19.10.2010 par ALBB
num.202 oct. 2010 p.24
Fête du Cirque à Versoix

Que le spectacle commence ! Le cirque Helvetia a pris ses quartiers, en septembre dernier, à côté de la salle communale pour quatre journées de festivités circassiennes. Retour sur une manifestation acrobatique dans le cadre de l’année mondiale du cirque. A Versoix, il existe une hiérarchie stricte des manifestations. On trouve en première place l’impérieux et révéré Festival du Chocolat — nouvelle vitrine de la commune — qui accueille les foules, venues de toute la région pour l’occasion ; suivent les fêtes de grande envergure réunissant la population locale autour de thèmes porteurs, à l’instar des Voltairiades qui avaient propulsé les Versoisiens au siècle des Lumières; et arrivent enfin les événements ponctuels qui, comme la fête de la jeunesse, produisent une animation capable d’évoquer le passé villageois d’une ville de près de 13’000 habitants. On est cependant bien emprunté au moment de classer la dernière née des manifestations communales: Versoix en piste. Si les efforts déployés par la commune ainsi que le budget alloué à la manifestation la fait figurer dans la deuxième catégorie, elle n’a pas réussi à donner l’illusion au public que, l’espace de quelques jours, Versoix n’était que nez rouge et paillettes. Un grand cirque pour un spectacle de qualité Pourtant, tous les éléments étaient réunis pour que la mayonnaise prenne. Ainsi, jeudi 9 septembre, jour du jeûne genevois, le cirque Helvetia a planté son chapiteau à côté du parking Lechenal et le public s’est senti mieux qu’à Plainpalais en foulant le tapis rouge de l’entrée. A l’intérieur, un spectacle saisissant l’y attendait, dans l’esthétique circassienne la plus traditionnelle. Clowns, poneys, mât chinois et strip-passing ont décliné le cirque tout au long de la soirée, au plus grand plaisir des conseillers municipaux le jeudi, des enfants le vendredi, et des autres le week-end. Tout le monde s’est accordé à dire que les numéros distillaient la magie et le suspense propres à cet art. La preuve que la représentation a convaincu le public: de jeudi, soirée de lancement où de nombreux espaces n’avaient pas trouvé preneurs dans les gradins, à dimanche où certains se sont vu refuser l’entrée par faute de place, les louanges se sont répandues dans les familles. Les demi-représentations réservées aux écoles enfantines et primaires y sont sûrement pour quelque chose. Cirque et éducation font parfois bon ménage Les enfants ne se sont néanmoins pas contentés d’observer, ils ont aussi été invités à s’essayer aux disciplines circassiennes. Les Ateliers des Arts du Cirque étaient effectivement le second invité d’honneur. Etienne Abauzit, directeur de cette école implantée à Versoix depuis plusieurs décennies, est connu comme le loup blanc sur la commune et rares sont les jeunes Versoisiens qui ne l’ont pas côtoyé durant une semaine de stage aux Colombières. Pour l’occasion, certains de ses élèves aguerris se sont produits sous le grand chapiteau, présentant des numéros qui révélaient les prouesses techniques et le sérieux de ces artistes en herbe. Ils étaient accompagnés par la Musique Municipale de Versoix qui, avec les concerts de l’école de musique Croqu’Notes et de la chorale scolaire, a fait la part belle à un art convoqué sans retenue dans les spectacles de cirque : la musique. Les jeunes de la villa Yoyo de la Pelotière ont pour leur part réalisé un projet d’utilité publique dans le cadre de l’action 72 heures qui a lieu chaque année en Suisse durant trois jours et voit des centaines de projets de ce type se développer. Ils ont ainsi assuré la propreté durant la soirée de jeudi et ont fait montre de leur talent de maquilleurs le vendredi. Enfin, les fidèles ont été accueillis sous la tente pour une célébration oecuménique dans un lieu très inhabituel, même pour les férus du chemin de Compostelle. Village de fête ou ville en fête? Si le chapiteau et les animations de la ludothèque ont drainé un certain nombre d’intéressés, les sociétés locales qui tenaient un stand dans le village de fête n’ont pas rencontré le même succès. En effet, l’engagement des bénévoles venus proposer de quoi se sustenter n’a malheureusement pas payé. L’affluence manquait car le public ne restait pas souvent manger sur place, et dans l’ensemble ne s’attardait guère dans le village de fête qui rougissait parfois de son complément de nom. Si les recettes ne sont pas encore établies, il n’est pas sûr que les bénéfices soient mirobolants. La commune, qui avait à coeur d’accueillir les acteurs de la vie locale, n’a pas appliqué le tarif exorbitant demandé pour l’occupation d’une tente au Festival du Chocolat. Les sociétés ont effectivement offert un pourcentage des bénéfices réalisés sur les boissons non alcoolisées à la commune en guise de monnaie d’échange, mais cet avantage n’a pas suffi. Du côté des autorités, l’humeur est à la satisfaction mais on sent que les efforts du service de la culture n’ont pas totalement porté leurs fruits. Cédric Lambert, conseiller administratif en charge de la culture et à l’origine de la fête, laisse poindre un sentiment de déception, contrebalancé par le plaisir d’une fête qui, pour lui, s’est très bien déroulée et dont l’ambiance était chaleureuse. Si la communication n’a eu de cesse d’avertir la population, notamment par le biais d’un tous ménages distribué dans la région, l’engouement n’était pourtant pas à son comble, et le public n’atteignait pas les prévisions. Restent de cette fête de beaux tableaux réalisés par les élèves de Montserrat Llusia dans le cadre d’Ecole et Quartier, un souvenir enchanté d’un spectacle sous chapiteau et peut-être l’envie chez certains de marcher sur un fil. Lisa Mazzone. Les «vieux» Versoisiens avaient encore dans leur coeur le souvenir lumineux de la Nuit du Fort (1989) et des Voltairiades (1994)… La magie des costumes préparés en ateliers, les préparations assidues dans les quartiers, l’engouement populaire pour une fête rassembleuse. Pourquoi donc la «mayonnaise» n’at- elle pas pris cette année ? Il y a des questions à exclure d’office : la date (le Jeûne Genevois avait aussi été choisi pour les autres), la météo (difficile d’avoir mieux), les décors magnifiques (merci à ceux qui les ont créés), la publicité officielle (il manquait seulement le bouche à oreille pour convaincre). Certes, Versoix a changé durant ces quinze dernières années: la population a augmenté, l’assiduité à la vie locale s’est dissipée. La commune s’est transformée en cité-dortoir : les gens se calfeutrent dans leur logement épiant le monde derrière leur écran croyant ainsi y participer. Rares sont les familles où les deux adultes ne travaillent pas, ce qui ne facilite pas des engagements bénévoles dans la vie locale. Ces données «sociologiques » sont indéniables. Le sens «d’appartenance» à la commune a disparu. Les enfants des écoles avaient vu le cirque avec leurs classes. Une bonne raison pour ne pas aller voir les représentations, ce d’autant plus que Knie était simultanément à Genève. Peutêtre que centrer cette fête sur un tel thème avait un goût de réchauffé ? Les autres attractions étaient trop peu nombreuses pour attirer la foule. Même si tous les stands de nourriture rivalisaient d’excellents menus, force est de constater que la population n’a pas un budget «sortie» extensible. Les prix étaient plus que raisonnables, les assiettes délicieuses, mais quand on vient avec ses enfants, c’est quand même trop cher…. J’ai même vu des familles venues le matin jouer, rentrer à la maison pour manger et revenir l’après-midi pour un spectacle… Comme la commune a réservé une bonne part du bénéfice de la vente des boissons sans alcool pour financer les tentes, les comptes définitifs n’étaient pas prêts. Toutefois, aucune société impliquée dans les cantines ne prévoit de grand bénéfice : pour quatre jours de travail, c’est un maigre résultat. Cette fête manquait surtout d’ambiance! Ceux qui ont vécu les précédentes se souviennent de personnalités fortes qui savaient fédérer autour d’elles, le service culturel était sur le pont durant toute la préparation et animait pendant. Des slogans, des harangues, bref, de la vie ! De plus, les sociétés impliquées avaient droit aux réponses nécessaires à l’organisation de manière suivie : bref, tout le monde tirait à la même corde. La Nuit du Fort et les Voltairiades représentaient l’aboutissement d’un travail en commun, comme une récompense. On se réjouissait d’avance et s’y est retrouvé avec plaisir. Cette année, on a pas senti d’enthousiasme, mais plutôt une obligation de faire quelque chose (Futura a eu lieu il y a dix ans et la «Fédé» cinq déjà !) On n’a pas vu de responsable du service culturel durant le weekend. Les conseillers administratifs ont tant bien que mal suppléé à cette absence. Chapeau, ce d’autant plus que ce n’est pas forcément dans leurs cordes. Costumés en illusionnistes, ils ont donné le coup d’envoi et, surtout, le change ! Administrer une commune ou animer une fête ne demandent pas les mêmes qualités…. J’aimerais tellement dire qu’il faut faire la fête ! C’est un bon moyen pour créer une vie sociale tant souhaitée, encourager les relations entre voisins. Gageons que, lors d’une prochaine occasion, le service culturel saura mieux fédérer et motiver les sociétés locales afin que le public puisse s’enthousiasmer pour une fête à Versoix ! Cette spontanéité, cet engouement sont indispensables à tout succès populaire lors de festivités, mais aussi à une vie agréable pour tous le reste du temps. Encore MERCI à tous ceux qui ont agi, tant au soleil qu’à l’ombre, pour permettre aux participants de se divertir un moment ! Anne Lise Berger-Bapst Cette fête manquait surtout d’ambiance ! Pourtant, tous les éléments étaient réunis pour que la mayonnaise prenne.
Photos de Lisa Mazzone.

auteur : Anne Lise Berger-Bapst

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