Le port de Tannay doit être refait ... mais comment ?
Le projet partiel d'affectation (PPA)
Sous la loupe : un port-promenade
Plan partiel d'affectation (PPA) contenu totalement sur la Commune de Tannay
Ce qui est critiqué
Emprise sur le lac. Disproportionnée ?
Emprise sur le lac comparativement à Founex, pour un même nombre de places d'amarrage.
Vie d'avion : le port de Tannay aujourd'hui (photo : google map 2012)
Superposition : Tannay le nouveau port sur l'ancien qui sera comblé !
Et si le port de Founex était implanté à Tannay ?
Superposition : PPA et Founex. 269 et 260 places
Emprise sur le lac, autre représentation
 
15.01.2015 par PAD
num.245 février 2015 p.06
Le référendum sur le PPA le Torry se joue à Tannay, le 8 mars, dans les urnes !

Le référendum contre le plan partiel d'affectation (PPA du Torry) - adopté en novembre 2013 par une courte majorité du Conseil communal de Tannay et, le 3 octobre 2014, par le canton de Vaud - a été déposé le 28 novembre 2014 avec 328 signatures validées (136 étaient nécessaires). Les citoyens et citoyennes de Tannay voteront le 8 mars 2015 sur ce PPA qui prévoit l'aménagement d'un nouveau port de Tannay de 269 places (le port actuel compte 55 boucles).
Le projet initial prévoyait un port commun entre les communes de Tannay et de Mies. En 2005, cette dernière commune a refusé (de peu) le projet jugé insatisfaisant. Alors, Tannay est partie seule, en novembre 2008, en adaptant les plans afin que le port tienne entièrement sur la Commune de Tannay ... qui ne compte que 80 mètres de rivage public !
Selon la coopérative qui porte ce projet dont la construction est estimée aujourd'hui à CHF 12 à 14 millions (à sa charge), les places seraient réparties de la façon suivante : 65% pour les souscripteurs de Terre Sainte (26% Tannay, 24% Mies, 15% autres), 19% pour les autres communes vaudoises et 16%, soit une quarantaine de places, seraient accordées à des souscripteurs venant du canton de Genève ou de France. Les places seraient vendues aux souscripteurs, selon la surface de l'emplacement, entre CHF 22'000.- et 90'000.- (prix moyen 40'000.-). Plus de 200 souscripteurs se sont déjà acquitté chaun d'une quote-part CHF 3'000.- pour les études.
Pour les opposants - représentés par M. Jean-Marc Keller du Comité référendaire, M. Roland Richard Martin (architecte qui avait travaillé sur les premiers projets et par ailleurs président du CNV), M. Yves Golaz (voisin habitant sur la Commune de Mies) et d'autres - ce projet est fort mal conçu, à l'envers du bon sens. Ce port serait dangereux pour les bateaux car les entrées sont situées contre la rive - là où le fond est moindre et où se déposent les graviers amenés par la houle - l'une en bise, l’autre en vent. En forme de parapluie, l’intérieur du port est séparé par une digue centrale (voir le schéma).  De plus, ce PPA définit l'emprise sur le lac et un document annexe précise que "... la forme générale du port et la matérialisation des jetées sont impératives ...". Il sera impossible, selon les opposants, de revenir en arrière sur le dessin du port en cas d'acceptation.

Pour eux, ce PPA est démesuré et dénaturerait le site de Tannay.  Ils souhaitent un nouveau port mais plus modeste et plus intelligemment conçu, il vaut mieux refuser ce projet et en proposer un nouveau plus concerté, notamment avec la municipalité de Mies.

Autres reproches :

  • Comparativement au port de Founex (260 places sur 20'000 m2), le PPA de Tannay représente une emprise sur le lac disproportionnée (269 places sur 36'000 m2), soit presque le double de Founex pour seulement 9 places de plus !
  • Le port proposé est coupé en deux par une allée centrale pour rejoindre la digue extérieure, laquelle serait aménagée en promenade publique arborisée et avec un kiosque, afin que chacun puisse jouir de deux cents mètres face au lac. Pour les opposants cet aménagement présente un danger pour les enfants, pour la sécurité génlrale et pour la navigation car elle oblige les bateaux à entrer et sortir du port toujours du même côté, quelle que soit la direction du vent !
  • L’ancien port sera comblé (ce qui est illégal selon eux, des recours sont à prévoir), le paysage sera dénaturé et la vue sur le lac et les alpes depuis le restaurant et le rivage, sera définitivement perdue en raison la distance jusqu'à la digue parallèle à la rive qui s'avance à 200 m de la rive.
  • La hauteur des digues, prévues sans enrochements (palplanches) pour diminuer l'empreinte lacustre, est insuffisante. Elles devront être rehaussées, ce qui coupera davantage la vue.
  • Sur la partie terrestre, le parking prévu est largement sous-dimensionné, il manquerait 120 places d’après les normes.
  • Le projet du port est payé par la coopérative, les aménagements à terre seront à l'entière charge de Tannay. Ce qui représentera une charge conséquente pour les 1600 habitants de Tannay, seuls à les supporter.
  • Dans le Conseil d’administration de la Coopérative, deux municipaux de Tannay siègent à titre personnel et portent le projet avec conviction. Quels intérêts vont-ils défendre, ceux de la Commune ou ceux de la Coopérative ?

Plusieurs navigateurs émérites dont Dominique Wavre et Nicolas Grange ont souligné la dangerosité de ce projet.

Face à cette avalanche de critiques et d'arguments, comment se positionnent la Commune de Tannay et la Coopérative,  partisans du PPA Le Torry ?
Le Syndic de Tannay, M. Serge Schmidt se dit confiant. Relativement nouveau, il n'a pas connu la genèse des projets, car le port de Tannay, avec ses 55 boucles et quelques places à terre pour dériveurs, date d'une époque où Tannay comptait 300 habitants. Et ce port montre des signes de vétusté au point que, semble-t-il, certains assureurs renoncent à assurer les embarcations ! Il faut donc faire quelque chose et il fait confiance à son collègue Patrick Simon qui a porté ces projets avec compétence et détermination, depuis 1974, date à laquelle les premières études ont été initiées. Quant à l'issue du scrutin du 8 mars 2015, le Syndic se dit tout aussi confiant pour le succès du PPA le Torry.


Le principal artisan du PPA, M. Patrick Simon - Municipal à Tannay en charge des aménagements et du port et Président du Conseil d'administration de la Coopérative du Port de Tannay créée le 31 mai 2000 - montre une assurance déterminée. Il reprend posément chacun des arguments des opposants pour les démonter sans se démonter. D'abord, il s'agit d'une très longue histoire, avec moults rebondissements : projets, il y en eu une trentaine de variantes, de toutes les formes, qui ont déjà coûté plus de CHF 215'000.- aux collectivités publiques et 600'000.- à la  Coopérative.

  • L'idée d'un "port-parapluie" s'est imposée en 1994 déjà, à cause de la proximité du Torry et de la plage de Mies qui serait "alluvionnée", ainsi que le port, avec un port classique. Des "spécialistes" ont été consultés.
  • En 1999, relance du projet auprès des entreprises lémaniques spécialisées et en 2000 instauration d'un partenariat public-privé avec la création de la Coopérative; travail avec les éternels opposants.
  • En 2005 un projet avec 310 places est adopté par Tannay mais refusé par Mies.
  • En 2008, Tannay repart pour rapatrier le projet sur cette seule commune avec une simple rénovation du port actuel qui s'avère beaucoup trop chère (env. 5 mio pour 55 boucles). Il relève assez justement que Tannay compte actuellement plus de 5x le nombre d'habitants par rapport à l'époque de la construction, c'est donc proportionnellement un port de 275 places qu'il faudrait. On est donc dans la cible avec les 269 places.

La Coopérative relance donc le projet communal. Cette taille est incontournable d'un point de vue économique, tout comme la mise à disposition du public de cette infrastructure : on ne peut priver les Tannayolis du rivage pour le réserver aux seuls navigateurs. Selon Patrick Simon, tout ce projet n'est pas figé. Il existe peut-être des aménagements pour rendre la digue centrale "amovible". Avec les deux ouvertures proches de la rive, c'est la seule solution, par ailleurs admise par le canton et les divers services, pour que l'eau circule et pour préserver la plage de Mies. Il reconnaît qu'avec cette configuration, ce port, s'il se fait un jour, sera plutôt un port pour bateaux à moteur que pour les voiliers qui, pour la plupart ne sortent que par beau temps et manoeuvrent au moteur dans les ports. Cela relativise le danger de la configuration des entrées non communicantes et proches de la rive. M. Simon peut également fournir des références de grands navigateurs (parmi les D35) qui trouvent le PPA intéressant.
Il a aussi une explication sur les motivations des opposants, acquise avec les 30 variantes étudiées successivement : on rencontre toujours les mêmes oppositions et opposants, venant très souvent de réflexes égoïstes des riverains qui craignent un changement de leur environnement !


Pour terminer ce tour d'horizon sur la question du "parapluie de Tannay", quels sont les autres exemples et expériences de "port-parapluie" sur le Léman ?  Des exemples permettraient d'évaluer les arguments respectifs des uns et des autres ! Mais je n'en ai trouvé aucun autour du Léman !
Il est étonnant que, sans cette expérience, l'Etat de Vaud, à qui appartient le domaine public des eaux, ait donné son accord pour une telle conception de "port-promenade-parapluie" !

En conclusion, l'adage et le sage disent "dans le doute, abstiens-toi".  Peut-on risquer une autre conclusion en forme de pirouette absurde en demandant ... pourquoi construire un "port-promenade-parapluie" alors qu'on se promène si peu quand il pleut ?

Les citoyens de Tannay trancheront le 8 mars 2015, on attend leur verdict avec intérêt.

Pour forger votre opinion sur cette controverse, voir le détail des arguments échangés sur les sites respectifs :
POUR  www.portdetannay.ch et CONTRE sur https://ppatorry.wordpress.com

Voir c'est croire ! Ci-joints, quelques documents et photo-montages : Tannay actuel, Tannay et le PPA Le Torry,  Tannay avec une superposition du port de Founex (260 place et même orientation par rapport aux vents).

Remarques pour alimenter la réflexion sur les ports :

  • Les listes d'attente sont longues pour obtenir une place d'amarrage sur le Léman, il faut être patient (environ 8'000 demandes en attente autour du Léman). L'attente peut durer 5 ans, c'est trop long. Créer des places améliore ce problème.
  • Selon certains, il vaudrait mieux agrandir les ports importants existants, plutôt que de céder à la création de nouveaux. Il y aurait moins d'effets négatifs sur l'environnement et moins de sources de tensions entre les navigateurs et non navigateurs par rapport à l'utilisation des rives. Mais il y aura bien, un jour, une limite à l'extension des ports.
  • Et de repenser aux solutions de boat sharing, mobility boat ou de partage de bateau entre plusieurs propriétaires car les bateaux sortent si peu !
auteur : Pierre Dupanloup

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