01.08.2017 par YR
num.271 septembre 2017 p.04
Couvrir la politique locale, choix et limites

Couvrir la politique locale, choix et limites

En janvier dernier, nous avons profité des vacances d'hiver pour prendre du recul et traiter des différents équilibres partisans de la commune ainsi que des pratiques typiques du Conseil municipal versoisien. Sa pause estivale est l'occasion de récidiver, cette fois-ci dans le but de détailler notre manière de traiter la politique locale, en mettant en exergue nos choix et nos limites.

Non-partisan ne veut pas dire tiède

À la différence de nombreux journaux locaux (ActuVernier, Tannayroli etc.), Versoix Région n'est pas édité par sa commune de domicile. Ainsi, ses journalistes et contributeurs bénéficient d'une liberté éditoriale, une qualité on ne peut plus importante dans le traitement de l'actualité politique.

Grâce à cela, le compte-rendu du Conseil municipal est plus qu'un procès-verbal condensé. Au bénéfice de nos lecteurs, libre de leurs opinions politiques, nous optons pour un angle non-partisan. Cependant, ce n'est pas parce qu'un organe de presse est hors du champ politique qu'il doit servir une soupe tiède !

Ces derniers mois, certains élus ont déclaré qu'à leur goût, la presse ne mettait pas assez en avant les efforts du personnel politique. Pour citer M. Lambert (maire de Versoix, PDC) lors de la dernière sérénade au maire : «la politique ne bénéficie pas toujours, notamment via certains médias, de la reconnaissance de l'engagement». Ailleurs, le bruit court que l'absence du journaliste en charge de la couverture du Conseil municipal au «verre de l'amitié» troublerait une portion du personnel politique local.

Notre conception du journalisme, dans ce qu'il produit et dans sa pratique, n'est vraisemblablement pas alignée à ces positions. Non, ce n'est pas à la presse de se montrer reconnaissante de l'engagement politique de l'un ou de l'autre. En traitant sérieusement de la chose politique, elle poursuit un but plus important : sensibiliser chacun aux enjeux et aux acteurs de ce monde.

Il n'est pas, à notre sens, dans le rôle du journaliste de faire des élus ses fréquentations, ses connaissances ou, pire, ses amis. À grande échelle, de telles relations mettraient forcément en question la crédibilité du journaliste, de ses articles, et du titre de presse qui les publie; que ces soupçons soient avérés ou non.

Les moyens du bord

Toutefois, les journalistes partagent de nombreux traits avec les élus : ils sont humains (ce qui les écarte de facto de toute attente d'infaillibilité) et disposent de moyens limités (surtout à l'échelon local), que l'on parle de temps ou d'argent.

Soyons directs : Versoix Région ne roule pas sur l'or, et chaque membre de l'équipe contribue au journal comme deuxième ou troisième activité. Ces moyens limités nous contraignent à concentrer notre couverture politique sur une poignée de rendez-vous (le Conseil municipal, et quelques manifestations).

Certains dossiers mériteraient un traitement plus important : les accusations de mobbing à la mairie de Versoix, une comparaison entre les programmes électoraux de 2015 et leur mise en oeuvre à mi-mandat, la co-habitation entre des élus de sensibilités différentes au Conseil administratif, etc.

Hélas, ces thématiques demandent des ressources : beaucoup de temps de travail, donc, en bout de course, d'argent pour le financer.

Ces sujets, pour la plupart sensibles, auraient de la peine à être ne serait-ce qu'évoqués dans les lignes d'un journal édité par les pouvoirs publics. Si ces formats reprennent les codes visuels et langagiers du journalisme, ils remplacent l'esprit critique et la curiosité par la nécessité de communiquer le message des commandataires, évitant tout ce qui pourrait le contredire. Une publicité, somme toute.

Terminons sur une note positive. La commune de Versoix peut s'enorgueillir de participer au financement de l'un des quelques journaux régionaux indépendants du canton de Genève.

C'est un paradoxe, mais c'est vrai : en communicant dans nos feuilles (à raison de deux pages achetée par numéro), la mairie de Versoix et le Conseil municipal contribuent à un journalisme libre de travailler dans l'intérêt de ses lecteurs.

Pourvu que ça dure.

Texte : Yann Rieder

auteur : Yann Rieder

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