16.05.2020 par ALBB
num.299 juin 2020 p.04
Chacun prêche pour sa paroisse

Cet article est rédigé le 16 mai. Avant-hier, le Conseil Fédéral a annoncé une ouverture officielle des frontières avec l'Autriche, l'Allemagne et la France le 15 juin. Des négociations étaient en cours avec l'Italie. Ce matin, cette dernière a décrété la fin du blocage de ses douanes le 3 juin. Le tourisme est trop important pour la péninsule pour perdre une saison... Tout s'accélère en ce qui concerne le déconfinement, donc impossible de prédire quelle sera la situation le jour où ce mensuel sera distribué et si ces propos seront toujours valables.

Il est indéniable que la crise du coronavirus a secoué le monde et notre pays dans ses relations sociales ou familiales, politiques, sanitaires et économiques. Il a mis à rude épreuve notre échelle des valeurs. C'est l'occasion de s'interroger sur l'essence même de notre civilisation. Est-elle humaine ou financière ?

En quelques décennies, tant de certitudes se sont évaporées. Une (r)évolution a bel et bien eu lieu. Lorsque j'étais enfant, dans un autre millénaire, le "quand dira-t-on", la pression sociale contrôlait la population autrement qu'aujourd'hui. Les églises avaient encore un certain pouvoir - pour ne pas dire un pouvoir certain - sur la moralité.

Mai 1968 est passé par là, libérant les moeurs, changeant les habitudes, brisant les chaînes des contrats "moraux". Les gens ont pu s'épanouir différemment, ignorant des jugements devenus désuets. Parallèlement, des progrès industriels ont eu lieu, permettant une vie plus confortable à une majorité de la population, du moins sous nos latitudes. Les églises ont perdu leur influence au profit de la réussite sociale et/ou professionnelle. L'avoir plutôt que l'être. Est-ce mieux ? Moins bien ? A chacun de juger ! C'est ainsi.

Les progrès économiques ont évidemment plus profité à certains qui n'ont pas manqué d'augmenter leur influence, changeant le climat social et politique. Le côté "morale stricte" a petit à petit été remplacé par l'envie du progrès et celle du profit à tout prix.

En mars dernier, d'un coup d'un seul, le pays a vu ses commerces, cafés, cinémas, bar, églises, la liste est longue, se fermer. Même les marchés ont été interdits. Des mesures sanitaires étaient exigées de toutes parts. Les magasins d'alimentation quant à eux ont pu rester ouvert par nécessité, suivis des autres commerces dès le 11 mai. Faut quand même sauver l'économie, non ?

Pendant ce temps, les églises sont toujours fermées ! Je ne suis, de loin pas, une grenouille de bénitier, mais franchement, cette situation me choque. Les temples de la consommation sont ouverts parce qu'ils respectent les règles, mais ceux de la consolation fermés ! Les pratiquants ont autant besoin de leur nourriture spirituelle que de leur repas. Pâques, Ascension, Pentecôte et le Ramadan ont été esquivés, quelle privation pour certains ! Autant dire que, il y a 50 ans, c'est l'inverse qui se serait produit... Le même questionnement peut se poser pour les théâtres et autres cinémas qui offrent une nourriture culturelle indispensable à la population.

La plupart des paroisses connaissent leurs fidèles. Après deux mois de confinement, tous les citoyens ont appris à respecter les règles. S'il faut éviter de chanter pour ne pas postillonner et écouter un CD, espacer les chaises ou les tapis, les clergés seraient parfaitement capables d'adapter leurs lieux et habitudes pour permettre la vie cultuelle de reprendre. Il devrait en être de même pour les responsables de salles de spectacles, en tout cas aussi bien que les gérants des magasins. Seulement voilà ! Les cultuel et culturel ne rapportent pas...

auteur : Anne Lise Berger-Bapst

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