01.11.2010 par ro
num.202 oct. 2010 p.13
Profitons du week-end du Derby pour retrouver la Versoix


Depuis quelques années, les eaux de la Versoix sont libres. Libres du tracé qu’elles dessinent, libres d’imprimer à leurs flots un rythme saccadé, intempestif ou serein. La forêt qui borde la rivière est directement influencée par les humeurs du cours d’eau. Partons à sa découverte
«Hier une rivière passait devant chez moi, aujourd’hui elle n’est plus là!»
Une rivière libre, ça vagabonde et ça coupe parfois les virages pour aller plus vite! C’est ce que s’est empressée de faire la Versoix une fois qu’elle eut été débarrassée du béton qui l’endiguait, à la grande surprise d’une de ses riveraines. Cette démarche de réhabilitation entreprise par la République de Genève au début des années 2000 visait à rendre toute sa liberté à ce cours d’eau qui dégringole des flancs du Jura. Coulant désormais sans entraves du pont de l’autoroute à son embouchure, la Versoix modèle le paysage en fonction de ses humeurs, érodant ses rives sous la puissance de son courant, inondant la forêt proche à chaque crue puis laissant derrière elle une vase riche en nutriments.
Maître sur ses terres
En s’éloignant de l’autoroute et de ses rumeurs, on pénètre dans une forêt sauvage où l’eau règne en maîtresse. Au coeur de cette zone alluviale, 7,3 hectares de plaine inondable sont, depuis 1935, sous la bonne garde de Pro Natura Genève. L’accès à cette réserve, le bois du Faisan, est interdit aux visiteurs a n de préserver ce biotope d’importance nationale ainsi que la quiétude des espèces qui y vivent. Cependant, un sentier écologique, bordé de panneaux, permet de visiter la zone adjacente.
Toute la forêt est maintenant laissée à son évolution naturelle. Elle n’est plus nettoyée par les forestiers, raison pour laquelle il y a autant de bois mort. Dans ce sol, argileux et riche en gravier, les grands arbres sont facilement déracinés.»
Les pieds dans l'eau
Même si l’on aperçoit encore quelques vestiges des anciennes canalisations, partiellement recouverts de mousse, la Versoix a aujourd’hui repris ses droits. «A mon avis, le niveau d’eau peut facilement varier d’un mètre en période de crue. Automatiquement, lorsque le courant est violent, les rives s’effritent, redessinant le lit de la rivière.» Le cincle plongeur et la bergeronnette des ruisseaux apprécient, quant à eux, particulièrement ces eaux vives, riches en invertébrés.
Au-delà d’un canal entretenu pour la reproduction piscicole, la réserve est une zone très ouverte, régulièrement inondée. Le sol meuble et frais semble retourné par des milliers de vers de terre, mais ce n’est là que l’action de l’eau. A chaque crue la strate herbacée disparaît sous la vase. Seuls les arbres appréciant d’avoir les racines dans l’eau résistent et se développent: saules, aulnes puis bouleaux. «Normalement, dans les zones alluviales on trouve très clairement un dégradé d’espèces végétales, de l’aulne au bord de l’eau au chêne qui a, lui, besoin d’un sol sec, le plus loin possible de la rivière. Ici, la canalisation de la Versoix a perturbé cette répartition naturelle et il faudra du temps pour que les essences retrouvent leur place», précise le biologiste.
Sur les talus latéraux, une hêtraie abrite une colonie de blaireaux et son réseau de terriers. Les castors, réintroduits dès 1956, vivent en contrebas, à l’abri de tout dérangement. Du faisan, par contre, il ne reste que le nom. Le gallinacé a disparu de la région depuis belle lurette!

Marjorie Siegrist

Pour plus de renseignements : Pro Natura Genève, rue Chausse-Coq 16, 1204 Genève, tél. 022 311 10 10. www.ville-ge.ch/cjb/png
 

auteur : rédacteur occasionnel

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