24.02.2012 par TM
num.217 avril 2012 p.10
L'envers du décor financier de Versoix (première partie)

Au conseil municipal, on vote uniquement un budget de fonctionnement et des le résultat que ce même budget a produit à la fin de l'année. Or, si l'implication est directe sur la fortune de la Commune de Versoix, le bilan actif/passif (ce qu'on a et ce que l'on doit) ne peut pas faire l'objet d'un vote et se fait donc absent des séances du CM. Si la marge de manoeuvre de l'organe exécutant (CA) est faible, il n'en reste pas moins que ce bilan recèle des informations qui pourraient influencer les décisions et pousser le CM à de nouvelles initiatives.

Le compte-rendu administratif et financier*

Certainement l'une des publications de la Mairie parmi les moins lues, le "Compte-rendu Administratif et financier" a longtemps souffert un retard dans sa publication, mais depuis 2010, on s'est oeuvré à tout mettre à jour et il semblerait que l'édition de 2011 nous parviendrait enfin dans des délais raisonnables (d'ici cet été).
Ce rapport contient une partie intitulée "SERVICE FINANCE ET COMPTABILITÉ", qui, outre un résumé du compte de fonctionnement**, regorge d'informations de second ordre, donnant parfois une vision totalement différente du paysage financier de la Ville.

Quelques clés pour lire ce compte-rendu

Bien qu'on ait parfois du mal à voir les liens entre les différents montants, d'où ils viennent et comment ils sont transférés, on peut en extraire un certain nombre d'explications.
Ainsi, en seconde page, on a le report des sommes à partir du compte de fonctionnement sur les investissements, et on peut y lire que leur financement est couvert par les montants amortis et l'excédent de revenus.
Pour clarifier les notions d'investissement et d'amortissements, on pourrait dire que l'un résulte des crédits votés (et explicités en fin de chapitre dans le compte-rendu) et que l'autre représente une perte de valeur des biens exploités. De cette façon, on peut avoir un coût estimatif des diverses activités de la Mairie, qui pour perdurer ont besoin d'être ré-équipées progressivement.
Dans les grandes lignes, les liquidités (ou disponibilités) qui figurent au bilan de l'actif, représentent de l'argent séparé du compte courant, soit des montants qui seraient accessible sans emprunt. Il conviendrait donc de les soustraire à la dette pour avoir une meilleure idée de la situation. Au passif, on note le terme curieux de Provisions, qui en tenant compte des (crédits d')investissement, permet d'inclure les montants qu'on va dépenser progressivement. C'est la façon comptable de prendre en compte des financements sur plusieurs années. On note aussi la présence de provisions spéciales qui sont relatives à des comptes auxiliaires.

Quelques observations

Si ce compte-rendu rend les comptes plus transparents, on peine encore à y voir clair, notamment concernant les provisions. Sans report exact des sommes, dépensées et dues à l'occasion des différents crédits, sans indications sur le calcul provisionnel, dont le chiffre minore tout de même l'incroyable progression des richesses de notre commune, et sans indication claire de manière de comptabiliser dans les actifs des montants dépensés, on a de la peine à se frayer un chemin et à pouvoir en déduire totalement l'état des finances et pour, au regard de celui-ci, considérer la pertinence de la politique économique.
En conséquence, on peut vérifier que l'augmentation de la fortune nette corresponde bien aux recettes de fonctionnement, soit 11,2 millions de francs contres 10,6 sur les six années qui séparent 2005 et le dernier jour de 2010.
On peut aussi relever les liquidités qui ont augmenté de 6,7 millions de francs et qui représentaient à cette dernière date plus de 13 millions.
Parallèlement, on peut constater que la dette a fondu de 8,1 millions de francs et ne s'élève plus qu'à 25,5 millions.
Peut-être, serait-il encore judicieux d'observer que les avoirs ont grimpé de 4,7 millions de francs et que les provisions, en raison des investissements votés afin d'effacer une impression de ville-dortoir, sont passées à 20,8 millions, soit une augmentation de 9,7 milliers de milliers.
Par ailleurs, le résumé du compte de fonctionnement nous apporte deux graphiques qui rappelle la provenance des fonds communaux et la façon dont ils sont dépensés. De la sorte, si l'on retire la vente d'une parcelle (opération qui n'a pas toujours figuré au bilan par le passé), il en ressort un total de 90% en provenance des impôts. Mis en relation avec le centime additionnel à 48 et les 32% de charges occasionnés par le salaire du personnel (sur l'autre graphique), un contribuable qui paierait 15'000 francs d'impôt annuel consacrerait environ 1'500 francs par année à ce dernier. Plus intéressant, peut-être, d'un point de vue électoral, la somme consacrée aux élus par ce même contribuable sur un mandat de 4 ans serait de près de 300 francs, de quoi prendre son vote avec considération.

Une politique économique saine financièrement

A travers l'opacité qui continue à flouer les liens entre les différentes sommes, on peut tout de même dire que la politique économique est saine, avec des avoirs à un niveau (19,9 millions de francs dont 7,1 millions sur le compte courant) qui laisse présager une augmentation des liquidités, probablement bien au-delà des 15 millions de francs et représentant 60% à 80% des provisions, on peut dire que la finance est saine, avec un taux d'endettement raisonnable (moins de 80% des revenus).
Cependant, on constate une volonté des plus hautes instances de mener une politique financière qui leur serait propre. Le léger flou qui règne autour de ces chiffres, et le désintérêt pour les détails (redoutés comme le Diable par Descartes) plus ou moins partagé par nos élus législatifs renforcent ce sentiment. Il est vrai que la tâche demande plus d'engagement que ce que l'on pourrait exiger. Mais il soulèverait des questions dignes de leur fonction. En effet, si l'on considère que les liquidités, engrangées pour faire face à la construction de Versoix-Centre n'ont servi à aucun projet, pourquoi n'a-t-on pas remboursé de la dette afin de payer moins d'intérêts pendant quelques années? Il est vrai que l'Etat subventionne le remboursement des intérêts et que la Commune n'aurait rien à y gagner, mais comme le relevait déjà Versoix-Région en 2011, la moralité d'une telle manoeuvre et le respect des institutions ne devraient-ils pas émouvoir les conseillers municipaux?
Par ailleurs, en scrutant les comptes, on voit que la vente du terrain de Saint-Loup en 2006 a permis de rembourser 5 millions de francs de dettes en 2007. Fallait-il vraiment vendre sans attendre, pour une somme qui peut être considérée comme assez modique, alors qu'on n'avait rien prévu de faire avec cet argent (reporté au final sur les liquidités)? Mais ceux qui habitent désormais les lieux ne seront pas forcément de cet avis.

Manque de transparence accidentel ou stratégie?

Certains estiment qu'on aurait dû informer la population des disponibilités, au moment de voter sur l'initiative du VRAC. Or, au moment de délivrer un préavis, le conseil municipal n'avait pas connaissance des liquidités dans son entièreté. Ce n'est que l'année suivante qu'on observe un bond de 7 millions de francs dans celles-ci et une diminution de la dette de 2 millions. Toutefois, les Conseillers Administratifs étaient, en fin d'année, certainement au courant de la situation. Le compte-rendu administratif et financier de l'année 2009 n'a certainement pas surpris tout le monde. Le financement de Versoix-Centre a été pesé et sous-pesé, selon une planification admirable qui n'est assurément pas le fruit du hasard. De plus, les avoirs, dans le compte-rendu de 2008 qui avait aussi souffert un retard administratif, s'élevaient alors à 28 millions de francs, soit 8,2 millions de plus qu'aujourd'hui. Toutes les clés étaient disponibles pour laisser une place à une autre réponse quant à l'argument de la poignée de millions qu'il eût fallu ajouter pour le projet du VRAC. Ignorance chez une partie du CM et mauvaise volonté du CA ont certainement influencé le vote ; quant à dire s'il s'agissait même d'une stratégie, seuls les intéressés peuvent y répondre.
En tout cas, on déplorera le retournement du CM, qui était pourtant majoritairement en faveur du VRAC lors de son élection, ainsi que le manque de dialogue et de clarté financière, qui auraient pu permettre un arrangement raisonnable, bien que le contre-projet salué par le peuple ne soit pas déplaisant. Celui-ci se serait toutefois débarrassé d'un goût amer en fin de bouche, si la démocratie n'avait pas été légèrement entravée par cette opacité.


Dans le second volet, il sera question de régler nos comptes avec les finances en traitant des points plus précis, avec quelques exemples qui risquent de vous donner davantage envie de vous intéresser.

*De 2006 à 2010: www.versoix.ch/downloads/cra2010.pdf, www.versoix.ch/downloads/cra2009.pdf, www.versoix.ch/downloads/cra2008.pdf, www.versoix.ch/downloads/cra2007.pdf,www.versoix.ch/downloads/cra2006.pdf

**Compte de fonctionnement 2010: www.versoix-region.ch/pxo305/pxo_content/medias/fonctionnement1.pdf ou http://tinyurl.com/7qkgoev en haute résolution.

Liens directs :

www.versoix.ch/downloads/cra2010.pdf (compte-rendu 2010)
www.versoix.ch/downloads/cra2009.pdf (compte-rendu 2009)
www.versoix.ch/downloads/cra2008.pdf (compte-rendu 2008)
www.versoix.ch/downloads/cra2007.pdf (compte-rendu 2007)
www.versoix.ch/downloads/cra2006.pdf (compte-rendu 2006)
tinyurl.com/7qkgoev (fonctionnement haute résolution)
www.versoix-region.ch/pxo305/pxo_content/medias/fonctionnement1.pdf (fonctionnement 2010)

auteur : Thomas Mazzone

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