10.10.2015 par LR
num.253 novembre 2015 p.24
Et vive la danse ! – Concert classique aux Caves de Bon-Séjour

Voilà la nouvelle saison des concerts classiques qui a débuté cette année le dimanche 27 septembre 2015 aux Caves de Bon-Séjour.
Sortant de l’ordinaire, nous avons assisté à un programme intitulé « Songes Ibériques », L’Espagne était à l’honneur dans un duo de danses, chants et musiques de compositeurs espagnols du 19ème et 20ème siècle : Albéniz, Granados, Mompou, de Falla et Garcia Lorca.

Pour comprendre la musique et la danse espagnoles, il faut se placer en intériorité dans le contexte historique mêlé de guerres internes et de pertes territoriales, une période difficile entre royauté et république dans un pays aride entrecoupé de chaînes de montagnes et bordé sur le sud et l’est par la mer. Nos compositeurs de cette période-là étaient présentés à travers leurs œuvres qui traduisaient ce ressenti d’âpreté, de violence intérieure jugulée dans ses moindres prémices.

Ainsi, la musique, la danse, le chant s’en ressentent. La vie doit jaillir sous quelque forme que ce soit : guitares, frappement des mains, gestuelle évocatrice, castagnettes, cajon, zapateado*, tout s’entremêlent dans une forme de poésie où vibrent l’émotion forte, le cri du cœur, la plainte, la supplication, la prière, le charme aussi.

Nos deux artistes : Maria-Angeles CUEVAS, chant et piano et Antonio PERUJO, danses, zapateado*, claquettes et cajon, ont su dans leur magnifique interprétation nous dévoiler cette âme espagnole.
Isaac Albéniz dans « Mallorca » et Cordoba laissait transparaître les beautés des paysages, le soleil, la mer, les bateaux et la joie de vivre de ses habitants. Jolis morceaux que pianiste et danseur ont si bien évoqués.

Dans « Zambra » d’Enrique Granados, on entre lentement dans cette intériorité fougueuse. Sur le dialogue entre claquettes et castagnettes chevauchaient des rythmes entrecoupés mais non moins mélodieux.
Que dire de la « Danza del Fuego » de Manuel de Falla exprimée en solo par Antonio Perujo. On ne pouvait que fortement applaudir cette gestuelle qui traduisait le jaillissement des braises, le feu qui crépite et la danse des flammes. Les zapateado* illustraient à merveille ce feu qui réchauffait.

Le chant étant partie intégrante du flamenco et du folklore espagnol, c’est à travers son grand poète Federico Garcia Lorca que la voix de Maria-Angeles Cuevas, sur les harmonies de son piano, nous interpréta 4 chansons populaires pleines de charme et de gaieté, souvent accompagnées aussi du cajon (sorte de tambourin) joué par le danseur. Le public y participait en tapant des mains savourant la richesse des harmonies. Un plaisir bien apprécié.

Le thème du temps qui passe dans « Charmes » de Federico Mompou, élève de M. de Falla, laissait filtrer toute une cascade de mesures très rythmées, aigues pour s’effacer en un torrent qui s’écoule peu à peu paisiblement : images du caractère espagnol.

« La Création seguidilla » de notre pianiste-compositrice apporta un élément très intéressant dans l’interprétation en pinçant les cordes du piano, ce qui ajoutait une expression de douceur, une sensibilité émotive. Cajon, castagnettes, danse, voix, piano, tout se concrétisait dans ce morceau très expressif, teinté de quelques notes de chimes bar, d’harmonies vivantes, rapides, élancées sur des thèmes joyeux répétitifs.

Le public était enchanté par ce concert, on entrait vraiment dans les « Songes ibériques », un peu d’Espagne intimement lié à notre pays. Félicitations et merci pour ces moments de bonheur.     

*) zapateado=danse des pieds.  Lucette Robyr
 

auteur : Lucette Robyr

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