13.04.2020 par FK
num.298 mai 2020 p.16
Antivirus : à propos de…la main

Elle recherche, rencontre, accueille,
Se rapproche, se glisse, s’éloigne,
S’ouvre, s’offre, se referme, se replie,
Se recroqueville….

Elle explore, joue, caresse,
Elle hésite, s’empare, tient, lâche,

Elle a chaud, elle a froid,
Elle est là, elle se perd, elle me perd.
Elle prolonge, elle me prolonge,
Elle me dévoile.

Je ris, elle exulte,
Je pleure, elle se crispe,
Je me fâche, elle tremble et cogne,
Je déteste, elle se referme et menace,
J’aime, elle caresse et s’offre.

Au monde, elle me relie,
Du monde, elle me sépare ou me protège.

Parfois, elle m’obéit, parfois elle me guide
D’elle à moi, de moi à elle,
Une étonnante complicité.

Sans elle d’ailleurs, qui suis-je ?

Elle me reflète, je la veux vivante et vraie,
Engagée, douce et déterminée,
Ni tremblante, ni nerveuse, ni agitée,
Plutôt agile, adroite, présente et à l’écoute.

Les années passent, elle change.
Labourée par le temps, elle s’enrichit.
Ses plis se rident.
Elle se creuse, ses os deviennent saillants,
Sa peau jaunit comme un vieux journal,
Ses doigts peut-être se déforment,
Elle est ma mémoire,
Elle témoigne de mon histoire.

Devient-elle douloureuse ?
Perd-elle de sa souplesse ?
Refuse-t-elle de m’obéir ?
Je lui en veux de me lâcher ainsi,
De me dire sans ménagement que je vieillis,
Qu’elle n’est plus ce petit poing fermé
Qu’elle a pu être quand j’étais bébé.

Malgré moi, au fil des ans,
J’ai quitté mon pouce
Pour m’appuyer sur une canne.

Et, ma main dans celle de mon destin,
Je poursuis mon chemin.

Francine Koch

auteur : Francine Koch

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