17.03.2021 par MG
num.307 avril 2021 p.06
Nos autorités ont toujours un plan B

 On peut constater que quand nos autorités s'opposent à une initiative, mais perdent la votation, elles trouvent souvent un plan B destiné à retarder aussi longtemps que possible le vœu des votants, voire même de déformer la volonté exprimée. Au niveau national, et particulièrement après l’acceptation d’une initiative de l’extrême droite (l’UDC en particulier), le plan B est simplement de débattre très longtemps au parlement les détails de la mise en oeuvre. Dans l’initiative appelée « anti-burqa », il y a une autre approche, qui est de décider que c'est aux cantons de légiférer individuellement.

A Genève, en réponse au succès de l’initiative populaire « pour un pilotage démocratique de l’aéroport international de Genève », nous venons d’apprendre l’approche du Conseil d’État, via le ministre de tutelle de l’aéroport, Monsieur Serge Dal Busco. Rappelons que l’initiative avait été acceptée le 24 novembre 2019 par plus de 57% des votants. Quinze mois après la votation, le 24 février 2021, un nouveau projet de loi (PL 12879) modifiant la loi sur l’aéroport international de Genève est présenté par le Conseil d’État.

Est-ce que ce projet correspond à l'initiative que les électeurs ont acceptée ? Bien sûr que non : ce projet ne change presque rien de la situation actuelle !

On peut craindre le pire avec la proposition de changer le nom de l’actuel CCLNTA (Commission Consultative pour la Lutte contre les Nuisances dues au trafic Aérien). La nouvelle commission sera nommée la Commission consultative pour l’accompagnement de l’évolution de la plateforme aéroportuaire (CCAEPA). Un nom qui dit tout et son contraire, mais qui cesse de parler des nuisances. Notons que déjà l’aéroport avait voulu renommer la CCLNTA en « Commission de l’Environnement !

Ensuite on peut lire que « La commission consultative a pour but de permettre les échanges d’informations et la concertation nécessaire entre l’établissement, les communes riveraines et leur population, les associations dont l'activité est en lien avec des politiques publiques connexes à l'exploitation de la plateforme aéroportuaire et les utilisateurs, soit en particulier les compagnies aériennes, de même que les services chargés du contrôle aérien. ». Est-ce que vous avez compris ? Moi, pas ! On voudrait noyer un poisson qu'on ne s'y prendrait pas autrement !

Autres informations sur les « devoirs » de la CCAEPA : La CCAEPA doit être informée chaque année de l’évolution des courbes de bruit de la plateforme aéroportuaire et des éventuelles mesures prises par l’AIG conformément à ses obligations découlant du PSIA et de la convention d’objectifs.

Rappelez-vous du fameux PSIA, qui permet à l’aéroport de nous infliger des décollages planifiés après 22 h du soir, une permission qu’a permis la planification plusieurs fois dans la semaine d’un départ à 22h45 d’un vol long-courrier vers l’Éthiopie, un pays actuellement en proie d'une guerre civile. Et, au cas où vous pensez que c’est bien d’avoir une convention d’objectifs, je vous rappelle qu'elle fut écrite et présentée à la population le 29 mai 2019, c’est-à-dire avant la votation, afin de convaincre les votants de rejeter l’initiative. Pari perdu ?

Actuellement il n’y a pas eu un vrai débat au Grand-Conseil de Genève : le projet de loi devrait être traité d’abord par la Commission de l’Économie. Sur le site du Grand Conseil, on peut lire qu’il y a pour la considération par cette commission une liste de 18 projets de loi, dont ce projet 12879 figure en dernière place. Et parmi les membres de la commission, il y a quelques hommes politiques qui sont toujours pro-aéroport !

Et quel est le plan B de l’aéroport, face aux riverains qui, ayant vécu une année avec nettement moins de nuisances jour et nuit, craignent de revenir à la situation en 2019 ? Silence radio : l’aéroport tient à sa proposition des nouvelles règles d’exploitation soumise aux autorités fédérales en septembre 2019, et qui a reçu beaucoup de protestations des genevois ! N’oublions pas que ce projet incluait des prévisions du trafic aérien en 2022 complètement irréalistes, tout comme le projet pour un nouveau cadastre de bruit nettement exagéré, alors que la demande minimale des riverains est d’adopter les prévisions (déjà optimistes !) pour l’année 2020 !

Il est évident que les plans B de nos autorités et de l’aéroport est, comme toujours, d’éviter d’implémenter les désirs des votants qui ont rejetés leur plan A.

Circulez : il n’y a rien à changer !

auteur : Mike Gérard

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