15.01.2023 par PL
num.325 février 2023 p.07
Mais que font les araignées en hiver ?

L'hiver, la plus dure des saisons pour la nature. Il force à faire migrer certains animaux comme les oiseaux, les quelques restants cherchent le peu de nourriture qu'il subsiste ou il les force à changer de régime. Les mammifères eux doivent parfois adapter leur pelage comme l'hermine ou entrer en hibernation comme le muscardin ou les chauves-souris ! Les batraciens (grenouilles, tritons, crapauds, salamandres) quant à eux quittent les points humides et migrent vers les bois où ils hiberneront jusqu'au printemps prochain.

Et les araignées, elles, que font-elles ?

S'il est vrai que l'on peut observer des araignées dans les logements même l'hiver, c'est le cas seulement pour une poignée d'espèces qui, à l'état naturel, vivent dans les grottes où les températures ne varient que très peu ou des espèces qui viennent de zones géographiques plus chaudes.

A l'extérieur, la plupart des espèces sont en mode repos jusqu'à des températures plus clémentes ! Elles passeront l'hiver à des stades jeunes, cachées dans la terre, sous les écorces, jusqu'à se réveiller au printemps, durant lequel elles effectueront quelques mues et deviendront adultes, c'est le cas par exemple, pour les Salticidae (araignées-sauteuses), les Thomisidae (araignées-crabes) ou les Lycosidae (araignées-loups). Parfois lors des périodes de soleil, il est possible de les voir se réveiller brièvement pour tenter d'attraper quelques précieuses proies avant de se rendormir.

Une autre grande partie des espèces va pondre en automne puis mourrir et laisser leur progéniture passer tout l'hiver sous forme d'oeufs. Elles seront réveillées seulement par la température chaude de la sortie de l'hiver et/ou le jour qui se rallonge. Les espèces qui font partie de ce groupe ont tendance à pondre beaucoup d'oeufs pour assurer leur descendance en cas d'attaque de parasites ! C'est le cas del'Épeire diadème (Araneus diadematus) qui en Automne peut pondre jusqu'à 900 oeufs bien emballés dans un cocon jaunâtre protecteur.

Une plus petite partie des espèces vivant en Suisse va quand même être active ! Certaines, comme les Anyphaena accentuata (évoquées dans notre précédent numéro) et les Phiodromus sp., ont dans leur sang une sorte de liquide anti-gel qui va leur permette de supporter les températures froides en dessous de 0°C. Elles vont pouvoir se nourrir de petites bêtes qui passent l'hiver sur les arbres et qui sont parfois des ravageurs de vergers.

Encore plus dingue, certaines espèces ont même leur cycle de reproduction durant l'hiver ! C'est le cas de certaines Linyphiidae, de très petites araignées qui vivent souvent dans la litière de forêt et qui font des toiles en nappes. Elles vont se nourrir de collemboles, des très petits arthropodes qui ne sont pas des insectes et dont une partie est aussi active en hiver.

La température anormalement chaude de cet hiver a probablement bousculé cet équilibre en faisant muer plus de fois ou plus tôt certains jeunes qui durant le printemps seront peut-être plus rapidement adultes ou souffriront d'une nouvelle vague de froid des décades d'hiver ? Le printemps prochain nous le dira. Ce qui est sûr c'est que certains oiseaux chantent déjà et que les châtons des noisetiers ont produit leur pollen en avance !

 

Photo 1 : araignée loup à la sortie de l'hiver (Pardosa hortensis)

Photo 2 : Pholque (Holocnemus pluchei) qui peut se voir toute l'année à l'intérieur

Photo 3 : cocon

 

auteur : Pierre Loria

<< retour