13.02.2024 par MAF
num.336 mars 2024 p.07
Pale Blue Dot

« Pale Blue Dot » est une photographie de la planète Terre, prise le 14 février 1990 par la sonde Voyager 1 à une distance de plusieurs milliards de kilomètres.

Notre foyer est minuscule et semble tellement insignifiant, perdu au milieu d’espaces infinis et silencieux qui effrayaient déjà Blaise Pascal, au 17e siècle. Mais cette insignifiance est en réalité toute relative. Puisque ce point bleu pâle abrita précisément l'homme qui a inventé la théorie de la relativité, Albert Einstein. Et qu'au-delà des jeux de mots bienvenus, cela signifie que la Terre a vu naître les plus grands des génies. Capables de développer des théories brillantes sur l'Univers qui nous entoure. Mais également de composer, d’écrire, de bâtir, de sculpter ou de peindre des chefs-d’œuvre immortels. Les Hommes sont capables du meilleur. Et la beauté sur la Terre ne se restreint pas à de magistrales créations humaines. La Nature est elle aussi une artiste formidable, elle sublime notre monde et Ramuz décrit si bien la chose dans son roman La Beauté sur la Terre : « Tout se faisait beau, tout se faisait plus beau encore, comme dans une rivalité. Toutes les choses qui se font belles, toujours plus belles, l'eau, la montagne, le ciel, ce qui est liquide, ce qui est solide, ce qui n'est ni solide, ni liquide, mais tout tient ensemble ; il y avait comme une entente, un continuel échange de l'une à l'autre chose, et entre toutes les choses qui sont sur Terre. Et autour d'elle et à cause d'elle, il y a une place pour la Beauté. »

Tout tient ensemble, oui. Mais cet équilibre est fragile. Notre demeure est vulnérable. Et cette photo, je trouve, le montre bien. Faut-il vraiment se rendre si loin pour parvenir à prendre le recul nécessaire ? Pourquoi nous attelons-nous avec tant de hargne à saccager ce tout petit scintillement, cet écho désespéré que les ténèbres entourent ? La NASA a immortalisé notre planète le 14 février 1990 écrivais-je, date de la St-Valentin, et je conçois cette photo comme une déclaration d’amour poignante. Quant à ce billet d’humeur, je le proclame Hymne à la Terre. Et, contrairement à ce que chantait Piaf dans son Hymne à l’amour, je ne pense pas qu’il faille « décrocher la Lune » pour lui prouver notre attachement. Isaac Newton et sa loi sur la gravité et l’attraction universelle ne dirait certainement pas le contraire. Nous devons en revanche reconnaître que la situation est précisément grave et tout mettre en œuvre pour préserver ce fabuleux écosystème.

L’espace est composé à 95 % d’une matière dont nous ignorons tout. Noire. Sombre. Et passablement désolée. Alors qu’attendons-nous pour sauver cette infime lueur ? Ce phare plein de promesses, cette arche miraculeuse, ce paradis tangible. Ce petit point bleu pâle. Probablement unique. Assurément irremplaçable. Manon

auteur : Manon Frésard

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