19.08.2024 par FIB
num.341 septembre 2024 p.09 Changer notre regard sur les feux d'artifice
Les yeux rivés sur le ciel, en admiration devant le spectacle de sons et lumières, nous sommes souvent inconscients des répercussions de ces quelques moments d’émerveillement sur tout ce qui nous entoure. Quels sont les impacts de cette tradition récente des feux d’artifice pour célébrer la fête nationale et le Nouvel An, ainsi que de l’utilisation privée de plus en plus fréquente de feux et de pétards ? Les animaux sauvages sont en première ligne, étant très vulnérables face aux bruits imprévisibles et aux flashs lumineux qui provoquent chez eux un réflexe de panique et de fuite. Les chevreuils et les lièvres souffrent particulièrement en raison de leur hypervigilance en tant que proies potentielles. Les oiseaux paient aussi un lourd tribut car réveillés en pleine nuit ils peuvent s’écraser contre des obstacles ou mourir de stress et d’épuisement. Il a été démontré que les feux d’artifice peuvent réduire leur taux de reproduction et leur durée de vie, ainsi que perturber leurs migrations. En hiver, ces fortes détonations tirent les animaux de leur hibernation mettant leur vie en danger, comme c’est le cas des hérissons qui ont une ouïe très fine, alors qu’en été les petits peuvent être séparés de leurs parents pendant plusieurs jours ou même abandonnés. D’après Tobias Blaha, directeur du Bioparc à Bellevue et vétérinaire, « les feux d'artifice peuvent faire très peur aux animaux du Bioparc et aux autres animaux sauvages. Cela peut prendre des jours, voire des semaines, avant qu'ils ne retrouvent leur comportement normal ». La grande majorité des animaux domestiques associe également les feux d’artifice à un danger et cherche à se mettre à l’abri, dont les chiens et les chats qui perçoivent les sons beaucoup plus forts que les humains. Il suffit parfois d'une seule expérience traumatisante pour déclencher chez eux une phobie du bruit et des feux répétés peuvent renforcer leurs réactions négatives (voir histoire de Pepo). Les animaux d’élevage, notamment les chevaux, sont aussi très sensibles au bruit et peuvent réagir en sautant de manière incontrôlée au risque de se blesser. Finalement, l’impact sur l’environnement et la santé est loin d’être négligeable: les feux d’artifice contiennent de la poudre noire et des composés métalliques générant jusqu’à 400 tonnes de poussières fines en Suisse par an qui finissent dans les eaux et les sols en même temps que les débris de projectiles. Sans parler du danger d’incendie omniprésent et des risques d’accidents tels que brûlures, affections respiratoires et cardiovasculaires ou lésions auditives et le stress majeur causé aux personnes sensibles. Tout en reconnaissant l’importance de célébrer ensemble la fête nationale et le Nouvel An, il existe aujourd’hui des alternatives modernes plus respectueuses du vivant et de plus en plus privilégiées en Suisse et en Europe, telles que les feux d’artifice silencieux, les drones et les spectacles de lasers. Une initiative populaire “Pour une limitation des feux d'artifice” a d’ailleurs été déposée à Berne avec l’espoir qu’une votation aura lieu d’ici deux ans. Elle souhaite interdire la vente aux particuliers et l’utilisation de pièces d’artifice bruyantes, tout en gardant la possibilité des feux pour les grands évènements. Nous pouvons espérer que le regard porté par la population et par les autorités de nos communes sur les feux d’artifice évoluera et que nous serons capables de fêter à l’avenir de manière plus responsable, sans porter atteinte au bien-être humain et animalier. En gardant les yeux grands ouverts sur les implications de nos actions, au lieu d’être éblouis par le spectacle. Fiona Blum auteur : Fiona Blum
|
<< retour |