19.09.2024 par AB
num.342 octobre 2024 p.07 Les BD coup de cœur du mois
Belmondo - Peut-être que je rêve debout... Après une biographie consacrée à Patrick Dewaere, un autre acteur emblématique, « À part ça la vie est belle » (2021, collection 9 1/2), Laurent-Frédéric Bollée (1967) nous livre avec son « Belmondo » un de ses plus beaux scénarios. Trois ans après la disparition de l’acteur, ce premier biopic en bande dessinée de la carrière de Jean-Paul Belmondo nous dévoile l’homme derrière le comédien à succès. Un roman graphique également intimiste, où la rencontre fictionnelle entre Paul, le père sculpteur, et le fils vedette de cinéma donne lieu à un récit inspiré, documenté et poétique. Dans son fameux style réaliste (Le complexe du chimpanzé, L’ordre de Cicéron) Jean-Michel Ponzio (1967) a dû éplucher une importante documentation iconographique et visionner nombre de films afin d’en tirer une belle brochette de portraits : Belmondo, mais aussi de Godard à Melville en passant par Brasseur et la plupart des acteurs qui ont côtoyé l’artiste dont évidemment le regretté franco-suisse Delon. Cette approche est particulièrement originale. Si ses professeurs du Conservatoire ne lui ont pas prédit un grand avenir sur les planches, c’est devant les caméras que Jean-Paul Belmondo va finir par se révéler. Le plus populaire des acteurs français excelle en assurant lui-même les cascades de ses films d’action et s’est singularisé par son attitude désinvolte qui a séduit un public fidèle en alternant films d’auteurs et comédies. On peut regretter tout de même que l’album commence à la page 23 après une interminable suite de panonceaux. Peter Pan de Kensington La nuit, le parc Kensington est interdit aux humains, alors que fées, gnomes et lutins prennent le relais. C’est dans cet espace onirique que s’égare la petite Maimie Mannering. Les créatures nocturnes ne lui cachent pas leur hostilité. Alors que Peter Pan pourrait aisément la tirer du pétrin et la ramener à la maison, il cherche plutôt à la convaincre de le suivre à Neverland, le pays imaginaire cher à Michael Jackson, où les gamins s’amusent toute la journée et ne vieillissent pas. Il se passe peu de choses dans ce conte assez court et très différent de la très belle série de Régis Loisel. L’auteur distille un sombre propos tentant un amalgame de merveilleux avec des personnages effrayants et une quête absurde. La noirceur de l’allégorie s’éclaire tout de même de quelques passages humoristiques, évoquant notamment des farfadets rendant visite à leur reine. Les profils psychologiques des protagonistes sont intéressants. Peter tout d’abord : en acceptant d’aider sa protégée, il tente de la convaincre de rester avec lui jusqu’à la fin des temps, de la garder pour lui seul et de briser ainsi sa solitude de jeune garçon, mort de la variole et vivant dans une sorte de limbes. Maimie n’est pas en reste; vers la fin de l’album, elle lui vole un baiser sur la bouche, comme si elle voulait l’attirer dans le monde des adultes… alors qu’elle n'a que six ans. Le fait que l’histoire soit succincte importe peu à José-Luis Munuera (1972) qui s’offre tout l’espace dont il a besoin pour s’exprimer. A travers de cases souvent très grandes, il invite le bédéphile à s’arrêter et à se laisser imprégner par l’ambiance mystérieuse et un peu glauque. Ses vues de Londres méritent d’être admirées. Enfin, la colorisation de Sedyas donne toute son ampleur aux dessins grâce à un mélange de teintes froides et sombres. Un conte qui fait écho à cette citation d’Abraham Sutzkever « Qui garde son âme d'enfant ne vieillit jamais ». auteur : Alexis Berset
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