Edmond Vallet dit « Monmon »
Dieu l’avait fait « simple ». Un atavisme génétique lourd avait fait le reste.
Monmon ne comprenait rien à rien ni personne. Vous interrogez des gamins de Versoix nés dans les années 40, ils ont tous été à l’école avec Monmon, qui devait donc en avoir fréquenté deux degrés pas plus ( !)
Monmon vivait dans les contours incertains d’une bulle au contenu glauque, dans lequel les étincelles remplaçaient la réflexion et les élans les intentions. Mais il vivait.
Alors pourquoi ces quelques lignes ?
Notre ancien Maire Pierre Wicht regrettait souvent l’époque où Versoix était encore une communauté avant d’être une commune. Monmon était représentatif de cet état d’esprit. Il était certes, financièrement, entièrement soutenu par l’aide sociale, mais il était logé, nourri, blanchi, encadré par des personnes d’un engagement exemplaire et d’une discrétion à toute épreuve. Des personnes qu’il faut saluer avec gratitude.
Monmon n’a jamais été interné, il allait et venait dans Versoix, libre de ses mouvements, en quelque sorte heureux de sa condition, heureux de vivre tout simplement. Il n’embêtait personne – ou si peu -, il faisait partie du paysage, il était parmi les gens. C’était comme ça dans le bon vieux temps, quand l’administration, les structures ne connaissaient pas encore le niveau de développement d’aujourd’hui. Et qu’il y avait, pour gérer le social, des « bonnes âmes ». En ce sens, Monmon avait valeur d’exemple, on n’osait pas trop le dire, mais on était fier pour Versoix que sa population, sa société civile, ait ainsi résolu – du moins en partie – son cas.
Monmon s’en est allé le 11 février dire en Haut-Lieu qu’il « n’a plus de sous » et que s’il faut semer la pagaille dans la circulation sur la Route de Suisse, on peut faire appel à lui.
Dans l’imaginaire populaire et collectif, on dit volontiers que les « simples » portent chance à la communauté qui les entoure. C’est si bon de le croire.
Salut, Monmon.
Gérard Ramseyer
