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18.01.2023 par SSP
num.325 février 2023 p.07
Passé-présent : le menhir du Mont Mourex

 Les “vieilles pierres” ont beau être inanimées, elles racontent. Les arbres centenaires ont beau ne pas bouger, ils témoignent. Ensemble, tendons l’oreille et imaginons !

Les habitués des commissions au centre commercial empruntent bien souvent la route de la Branvaude qui relie les deux Chavannes – des-Bois et de-Bogis – longeant ainsi une grande colline, pas vraiment une montagne, qui s'étend entre Grilly et Divonne. Intermède extra-urbain, vue champêtre et de bocage qui longe la Versoix et fait frontière, cette éminence verte appelle à l’ascension. Point trop haute, point trop éloignée, on devine que de là-haut on aura une vue dégagée. Il faut suivre alors Grilly, et depuis là monter.

C’est le Mont Mourex, dont le sommet dénudé et arpenté sans relâche, témoigne d’un intérêt millénaire pour son panorama sur la cuvette du Genevois et le Jura (notamment la clé de Fort l’Ecluse), mais aussi pour ses pâturages accessibles et ses forêts de châtaigniers. Ce haut-lieu vibratoire, d’après les spécialistes de la question, était le théâtre d’un cromlech (cercle de pierres dressées) connu des habitants des environs, mais détruit au début du 20e siècle et dont n’a subsisté qu’un menhir. Il a été redressé dans les années 1990 par l’association Orilan, qui valorise la culture et le patrimoine de la région. Le site est orienté face au Mont-Blanc et on suppose que par sa position il était relié à d’autres sites mégalithiques, en plus de son alignement avec le soleil.

Les pierres dressées, nombreuses dans la région, nous renvoient dans le passé celtique, et le statut de « communs » de ces espaces évoque aussi les temps médiévaux. Le panorama lui, rappelle un temps très reculé, avant la mort de Rodolphe III roi de Bourgogne, où toute la région appartenait à un seul et même pays, car c’est en 1034 que l’évêché de Genève fut séparé de son arrière-pays pour devenir une ville de l’Empire germanique.
Le mont Mourex et son organisation intéressent aussi pour le futur : preuve en est une recherche toute récente menée par Camille Gilloots à l’Université de Lausanne en fondements et pratiques de la durabilité, sur l’exemple de la gestion de ce « commun » jurassien et les possibles qu’il incarne pour l’avenir.

A chaque saison la visite de ce site apportera son plaisir. Ces jours, la neige recouvre tout et invite à la luge. La solitude n’y sera pas très durable, tant le lieu est apprécié. Peut-être rencontrerez-vous Yassine l’éducateur canin et sa petite classe de compagnons à quatre pattes de la Doggy School ; ce lieu est son église, m’a-t-il dit, et c’est une évidence : posé entre Jura et plaine, on goûte ici la sérénité et un état suspendu entre ciel et terre. Vous y changerez votre point de vue sur Versoix, sur le Jura, sur l’organisation du Genevois qui n’a pas toujours été celle que vous connaissez. Un point de vue millénaire, qui vous offrira une impression sans frontière.


Pour en savoir plus sur le Mont Mourex, son menhir et les activités qui s'y déroulent, consultez le travail de Camille Gilloots, disponible en téléchargement à l'adresse https://igd.unil.ch/memoires/memoires/1934 ; le site de l'association Orilan, orilan.fr ; et un site dévoué à la défense des communs de Mourex, mourex.fr.
 

 

auteur : Sarah Schmid-Perez

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