Nul besoin de présenter la famille Levrat à Versoix tellement elle aura marqué l’histoire de la région sur plusieurs générations à travers l’engagement et le dévouement de ses membres envers la communauté au niveau institutionnel, académique et politique. La contribution de cette famille au domaine artistique reste cependant méconnue et la magnifique exposition « Architecture : les trois dimensions de Frédéric Levrat » organisée par la Ville de Versoix jusqu’au 26 mai 2024 est une belle occasion de combler cette lacune.
Frédéric décrit cette exposition dans sa ville natale comme « un véritable honneur et une opportunité pour se poser les bonnes questions, tisser un lien entre ses activités disparates et dégager une direction de vie». Il exprime sa gratitude pour avoir grandi au sein d’une famille avec de solides valeurs éthiques et morales et pour son enfance à Versoix qui lui aura permis d’acquérir une éducation saine et variée, de développer son goût pour le sport ainsi que de fidèles amitiés. Il y revient régulièrement en famille afin de retrouver les siens et se ressourcer loin de la frénésie new yorkaise.
Son départ à New-York à 22 ans sera nécessaire et bénéfique afin de s’extraire d’un carcan suisse castrateur et se sentir libre « d’être expérimental et de faire des erreurs «. Il aura l’audace d’approcher le prestigieux Peter Eisenmann puis Tadao Ando au Japon et Zaha Hadid qui le prendront sous leur aile et marqueront son œuvre jusqu’à aujourd’hui. « Ce fut une chance extraordinaire de travailler avec ces grands maîtres, tous profondément humanistes et non conformistes, d’avoir leur confiance et de pouvoir leur offrir mes idées en retour. Ils poussaient l’architecture dans ses limites et démontraient que c’était possible».
Sa curiosité et sa soif d’explorer se reflètent d’ailleurs dans l’éclectisme et la riche diversité de son travail réalisé depuis 30 ans sur plusieurs continents et qui comprend des œuvres reconnues internationalement et plus modestes, des projets avant-gardistes et humanitaires ainsi que de nombreux prix, conférences, expositions et publications. Il parle avec émotion de son expérience en Afghanistan, où il a construit des écoles primaires et cliniques de santé, ainsi que dans les bidonvilles en Afrique du Sud : « Il est tout à fait possible de faire des créations simples, belles et joyeuses sans beaucoup de moyens tout en respectant la culture et la dignité des personnes qui en bénéficieront ».
Il témoigne également avec reconnaissance de son expérience d’enseignement dans les meilleures universités au monde qui lui permet de côtoyer des professeurs extraordinaires et de transmettre ses connaissances avec passion à des étudiants du monde entier: «Ce niveau d’excellence me stimule et m’oblige à donner le meilleur de moi-même. Le dialogue avec mes étudiants est aussi très enrichissant, je leur dis toujours que si j’enseigne c’est parce que je veux apprendre d’eux ».
Finalement, Frédéric espère que cette exposition puisse « être une fenêtre sur le monde qui permette de voir l’architecture comme un art et une philosophie plutôt qu’une fonction, comme un mode d’esthétisme, de société et de pensée qui donne la possibilité de repousser les conventions dans le but de se questionner et de rêver ». Nous encourageons donc vivement nos lecteurs et lectrices à se rendre au Boléro afin de profiter de cet évènement d’une rare envergure à Versoix et qui sera le dernier organisé par M. Olivier Delhoume avant son départ à la retraite fin mai 2024.
Fiona Blum
