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17.09.2025 par FIB
num.351 septembre 2025 p.07
Projet de décharge en bordure de la Versoix: réveillons-nous!

Déverser plusieurs millions de tonnes de gravats et de déchets pollués (type amiante agglomérée, béton, goudron) pendant 10 ans en plein cœur d’un milieu naturel protégé, d’un corridor biologique majeur au niveau suprarégional et de la dernière zone humide de l’Ouest lémanique qui longe la Versoix entre Chavannes-des-Bois et Chavannes-de-Bogis : ce projet titanesque semble tellement aberrant au point de vue écologique qu’il ne mériterait même pas qu’on s’y attarde. Et pourtant, il est à prendre extrêmement au sérieux en raison du manque critique de sites de stockage pour les déchets de construction sur le Canton de Vaud qui pousse l’Etat à chercher des solutions coûte que coûte.

En l’absence de processus démocratique et de transparence, ce projet de décharge est en train de prendre dangereusement forme et de se réaliser sous la pression du Canton de Vaud. Tout d’abord, le futur exploitant a signé des conventions avec les propriétaires des parcelles pour l’exploitation de déchets de type A (gravats) et B (pollués), prévoyant des paiements conséquents en contrepartie. Ensuite, ce site a été retenu en première priorité dans le Plan de gestion des déchets du Conseil d’Etat vaudois en 2016 et confirmé en juin 2024 parmi 117 autres sites de décharge potentiels. Finalement, les autorités des communes de Chavannes-de-Bogis et Commugny, ne se sont pas encore prononcées sur le sujet, alors que le lieu-dit « Tattes-de-Bogis » se trouve sur leur territoire.

Un autre fait sidérant est l’absence totale de concertation de la population locale et le silence régnant au niveau cantonal et communal (sauf à Chavannes-des-Bois qui s’est prononcé contre en mars 2025), alors que le projet est connu depuis plus de 10 ans. Compte tenu de la pollution et des nuisances occasionnées par la décharge et par le trafic de camions ainsi que de la proximité de la Versoix, c’est la population de toute la région qui sera impactée et qui doit également être consultée. Or la possibilité de s’exprimer est limitée à deux occasions pendant une très courte période : la consultation publique sur le plan directeur cantonal qui a lieu entre le 8 juillet et le 19 septembre 2025 et la mise à l’enquête publique du projet de décharge prévue fin 2025/début 2026 permettant une opposition formelle pendant 30 jours.

Cela vaut la peine de consulter le document préparé par la Direction générale du territoire et du logement (DGTL) pour la consultation publique* afin de mesurer l’absurdité du projet. On y lit que « des mesures compensatoires sont prévues, de sorte que ce projet apportera à terme une nette amélioration de la situation générale d’un point de vue écologique ». Les personnes ayant rédigé ce texte ne se sont manifestement jamais rendues aux abords d’une décharge de type B pour constater le paysage apocalyptique et l’atmosphère de mort qui y règnent. Chercher à nous faire croire qu’une telle décharge est un bienfait pour l’environnement est tout simplement une insulte à notre intelligence de citoyen-ne.

Il est donc très important pour toutes les personnes intéressées et concernées par le projet de décharge, de saisir l’occasion de la consultation publique actuellement en cours pour s’exprimer clairement en écrivant au canton par lettre ou par e-mail avant le 19 septembre 2025 (voir détails sur la communication d’EcoLaVersoix ci-contre). La consultation publique est ouverte à tout le monde y compris les citoyen-nes de Suisse et de France voisine, sans restriction d’âge ou de nationalité, ainsi que les autorités et les associations. Si nous ne manifestons pas aujourd’hui notre désaccord en grand nombre et de manière virulente, nous risquons de nous réveiller très prochainement en plein scénario cauchemardesque sans aucun moyen d’action.

Ce projet est certainement révélateur d’un défi majeur de notre société de consommation effrénée : la production et la gestion des déchets, qu’ils proviennent des particuliers, de l’industrie ou de la construction. Chacun-e d’entre nous a le devoir civique d’en prendre conscience et d’agir en conséquence en adoptant de nouvelles habitudes. Mais il revient à l’Etat, en collaboration avec le secteur privé, de trouver des solutions innovantes pour le traitement et l’élimination des déchets qui soient respectueuses de notre environnement et de notre santé. Le projet de décharge aux Tattes-de-Bogis est donc à ranger définitivement là où il a vu le jour : au fond du tiroir poussiéreux d’un bureau de l’administration vaudoise.

Fiona Blum

Pour plus d’informations : www.ecolaversoix.ch

*Fiche 10 Décharge Tattes-de-Bogis (F42) www.vd.ch/actualites/consultations

 

auteur : Fiona Blum

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