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15.10.2025 par FIB
num.353 novembre 2025 p.05
Rénovation de la route de la Branvaude : une nouvelle menace pour la biodiversité

e chantier de réaménagement de la route cantonale de la Branvaude (RC7), entre Chavannes-des-Bois et Chavannes-de-Bogis, a débuté en mai 2025 pour une durée prévue de 3 ans et avec plus de 15 millions de francs investis par le Canton de Vaud. Dans le but d’améliorer la sécurité des usagers et de renforcer le dispositif de protection de la faune, il prévoit la rénovation et l’élargissement de la chaussée, la création d’un trottoir de 250 mètres et de bandes cyclables, la mise en place de dispositifs pour les amphibiens et le gibier ainsi que la modernisation du système d’évacuation des eaux et des réseaux souterrains.

Les embouteillages massifs provoqués début septembre par la fermeture de la route entre le giratoire de la Placette et le croisement descendant vers Tannay, démontrent l’importance de ce tronçon routier très fréquenté, notamment par les frontaliers, avec un passage en moyenne de 11 250 véhicules par jour dont 250 camions. Même si le réaménagement de la route de la Branvaude est bienvenu pour répondre aux normes actuelles de sécurité, il comporte des aspects menaçant directement la biodiversité d’une région déjà fortement fragilisée par le trafic intense actuel et sous le joug imminent du projet de décharge des Tattes-de-Bogis (voir article ci-dessus).

Tout d’abord, les mesures environnementales proposées en faveur de la faune paraissent bien faibles face aux futures nuisances causées à cette zone de haute valeur écologique très vulnérable. La nouvelle route sera non seulement plus fréquentée mais permettra de rouler plus vite avec une limitation de vitesse toujours fixée à 80 km/heure, ce qui est incompatible avec la présence d’un couloir à faune terrestre d’intérêt suprarégional déjà identifié comme perturbé. De plus, l’élargissement de la chaussée créera une barrière beaucoup plus conséquente pour la faune avec un risque d’écrasement accru malgré les dispositifs de protection prévus.

Le système d’avertissement de la faune choisi par les autorités, basé sur la détection des animaux par des capteurs infrarouges et des signaux lumineux alertant les conducteurs, peine également à convaincre. Sans une réduction de vitesse imposée, son efficacité risque d’être limitée sur ce lieu de passage très fréquenté par les cerfs descendant du Jura et dans une zone de reproduction et d’alimentation pour de nombreuses autres espèces animales. Les récentes collisions avec du gibier survenues sur la route de Sauverny entre Versoix et Chavannes-des-Bois, malgré une réduction de la vitesse à 60 km/h, démontrent la nécessité de combiner plusieurs mesures pour prévenir les accidents au maximum.

De plus, en raison de la chronologie et de l’ampleur des travaux entrepris, il est difficile de ne pas faire le lien entre ce chantier, dont l’approbation a été soudainement accélérée, et le projet de décharge des Tattes-de-Bogis qui nécessiterait une solide infrastructure routière avec un passage quotidien de 65 camions de 40 tonnes de déchets. Sachant que le Canton de Vaud est à l’origine des deux projets, certaines mesures de protection semblent totalement incohérentes. Faut-il vraiment aider les batraciens à traverser la route par des crapauducs pour se retrouver au milieu de déchets toxiques, en sachant que ces amphibiens respirent par la peau et sont extrêmement sensibles à la pollution ?

Finalement, une pollution de la Versoix est survenue fin septembre 2025 suite à un déversement accidentel de résidus lié au chantier de rénovation de la route cantonale. Alertées par des promeneurs, les autorités sont intervenues pour mettre en place des mesures de protection temporaires en attendant les résultats des prélèvement effectués. La pollution a persisté malgré l’installation d’une cuve à gravier filtrante, nécessitant une nouvelle alerte citoyenne début octobre. Il est très préoccupant de constater qu’aucune mesure de drainage adapté n’ait été mise en place malgré l’inscription de cette zone à l’inventaire fédéral des zones alluviales d’importance nationale. Fait d’autant plus inquiétant que l’entreprise de construction mandatée pour les travaux de rénovation de la route fait partie du même groupe que celle choisie pour l’exploitation de la future décharge.

Face à cette succession d’incohérences et d’incidents, l’inquiétude grandit pour l’avenir de la biodiversité de la région, provoquant l’émergence d’un mouvement citoyen de plus en plus déterminé à protéger l’environnement fragile de cette zone pour les générations futures. Reste à savoir si cet éveil des consciences suffira à infléchir la trajectoire choisie par les autorités vaudoises et à préserver nos milieux naturels. En attendant, profitons encore de la quiétude de ce lieu magnifique, avant que le bruit des moteurs et le bitume ne reprennent leurs droits.

Fiona Blum
 

auteur : Fiona Blum

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