25.08.2021 par MG
num.311 septembre 2021 p.15
Intérêts compris

Quand la réunion COP25 a été déplacée du Chili à l’Espagne, l’activiste suédoise Greta Thunberg se trouvait aux États-Unis. Une compagnie d’aviation lui avait proposé un vol comprenant une compensation pour les émissions de CO2. Ne voulant pas l'accepter, considérant qu'il s'agissait de "greenwashing", elle avait trouvé une place à bord d’un voilier avec une famille australienne et un navigateur professionnel britannique. On peut l’aimer ou la détester, mais on doit admettre qu’elle pratique ce qu’elle prêche.
Un autre Suédois, Johan Lundgren, directeur général de la compagnie d’aviation easyJet, a annoncé fièrement l’offre de sa compagnie de devenir « neutre en carbone » via un paiement annuel de 25 millions de livres sterling. Sa proposition : une compensation carbone temporaire en attendant de mettre au point la technologie permettant aux avions de voler avec des moteurs hybrides ou électriques ».
Or, comme confirmé par les calculs des organisations externes, cette somme est nettement inférieure à celle calculée par le site myclimate.org. On peut également remarquer que si les effets du réchauffement planétaire continuent au même rythme qu’actuellement, les avions hybrides ou électriques viendront nettement trop tard.
Notre aéroport de Genève semble avoir réalisé qu’il faut faire un effort. Sur le site Web de l’aéroport
https://www.gva.ch/fr/Site/Geneve-Aeroport/News/2020-2016/Geneve-Aeroport-contribue-a-la-compensation-carbon
« Genève Aéroport et myclimate s'associent pour soutenir la fabrication et la distribution de fours solaires, à Madagascar.».
Pour participer, on doit utiliser le lien
https://www.gva.ch/fr/Site/Passagers/eservices/Compensation-Carbone
via lequel on peut spécifier le type de vol (Europe ou Intercontinental), le type de voyage (aller simple ou aller-retour), la date du voyage et le nombre de passagers. Le montant de compensation carbone sera calculé, dont la moitié sera payée par l’aéroport.
Exemple : aller simple Genève-Manchester le vendredi 13 août 2021 : montant 6 CHF, dont 3CHF payé par l’aéroport.
Ensuite, pour régler son dû, il faut s’inscrire sur le site, en remplissant un questionnaire sur ses habitudes de voyager. Autrement dit, on sera « fiché » par l’aéroport !
L’idée d’inciter les passagers à contribuer à la lutte en faveur du climat me plaît beaucoup. Néanmoins, dans l’explication de la procédure à suivre, la remarque suivante m’interpelle :
«Il se peut que votre compagnie aérienne compense déjà ses émissions de carbone. Nous vous invitons à vous renseigner auprès d'elle pour obtenir plus d'informations sur ses démarches environnementales ». N’est-elle pas justement une incitation aux passagers de ne rien payer, en particulier pour les vols easyJet ? Dans ce cas, et en supposant une moyenne de 150 passagers par vol pour les 2'800 vols en juillet 2021, si tous les passagers payaient les CHF 6.- la somme se monterait à environ CHF 2.5 millions, dont la moitié serait à la charge de l’aéroport.
Pour une bonne partie de la population, ces "compensations" sont considérées comme "greenwashing". Selon un article dans la presse britannique, les passagers ont maintenant le choix de compenser leurs émissions de carbone pour se tranquilliser leur conscience. Toutefois, planter quelques arbres suffira-t-il à les soigner de leur addiction de voyager en avion ?

On a pu lire, dans le Financial Times du 4 août, un article qui commençait par la phrase "les feux de forêts aux USA transforment les espoirs en cendres". Selon ce reportage, les compagnies Microsoft et BP avaient acheté les crédits pour la plantation d'arbres dans les états de Washington et Oregon, mais les incendies, comme dans plusieurs autres pays, ont détruit ces plantations !
Dernière remarque : on entend souvent de la part des gouvernements et des grandes entreprises le désir de devenir neutre en carbone en 2050. Or, selon le GIEC, les désastres actuels montrent que le changement de climat est déjà une réalité.
 

auteur : Mike Gérard

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