15.11.2021 par PAD
num.314 déc.2021-janv.2022 p.10
Quel avenir pour la Zone Villa à Versoix ? Une séance houleuse

Densification de la zone villa à Versoix

La zone 5 (villas) héberge un habitant sur dix et n’échappe pas à la logique de densification.
Cadre légal, quelles sont les règles de densification ? Depuis 2013, la modification de la loi sur les constructions et installations (LCI), a permis d’augmenter l’indice d’utilisation du sol (IUS) selon différents cas :
Un IUS de 0,25 signifie que sur un terrain de 1000m2 en zone 5 on peut construire un (ou des) logement(s) de 250 m2 de surface brute de plancher (SBP) (surface habitable chauffée).
a) en densification faible IUS de 0,25 à 0,275 (ou 0,3 avec une « haute » performance énergétique HPE)
b) en densification accrue IUS de 0,3 à 0,44 (ou 0,48 avec une « très haute » *THPE)
Pour obtenir une densification accrue, il faut en plus l’accord de la commission de l’architecture et que le projet s’intègre « harmonieusement avec le caractère et l’aménagement du quartier ». Ce cas est devenu la norme ... avec ses excès !
c) en « surdensification ». Sous certaines conditions (regroupement de parcelles > 5’000m2) et avec l’accord de la commune (droit de veto) la densification peut aller jusqu’à un IUS de 0,55 (0,60 avec THPE) pour des villas contiguës ou petits immeubles, sans modification de zone.
C’est ainsi que les demandes d’autorisations ont augmenté de 30% en 5 ans et que le nombre de logements (dossiers déposés) par année est passé de 488 en 2014 à 839 en 2019 ! (Source : office de l’urbanisme GE).
Les promoteurs en immobilier sont évidemment à l’affût des parcelles densifiables, pour preuve les sollicitations de plus en plus fréquentes reçues chaque semaine (même dans ce journal !).

Conséquences ? La bétonisation de la zone villa a donc rapidement posé des problèmes de suppression de grands arbres, d’imperméabilisation du sol favorisant les crues, d’atteintes aux écosystèmes et au patrimoine, d’accroissement de la circulation et de la mobilité individuelle. En bref, une dénaturation de la zone villa qui a conduit à un moratoire d’une année sur l’article 59 (LCI) prononcé en 2019 et à une modification de l’article 59-4 (LCI), entrée en vigueur le 19 janvier 2021. Cette modification qui donne en partie plus de pouvoir aux communes pour les zones en densification accrue, implique qu’elles définissent dans leur plan directeur communal les secteurs concernés par une densification accrue (sur lesquels leur accord sera requis lors des autorisations de construire) ainsi que les lignes directrices à respecter. Et ceci avant la fin de 2022.
Nouveau également : les règles de densification intègrent désormais un indice de pleine terre ou indice de verdure (IVER) d’au moins de 40% dans tous les cas (art. 59-3bis). Cette exigence favorise les constructions en hauteur ainsi que l’irrigation et la présence de grands arbres. Une taxe visant à financer les compléments d’équipements publics serait due par le constructeur pour les "surdensifications". Ce contexte législatif contraint donc la Ville de Versoix à inclure cette problématique dans son PDcom avant la fin de 2022. C'est pourquoi une étude de planification de la zone 5 a été demandée à un mandataire par la Commune de Versoix.

Première consultation publique sur la densification de la zone villa à Versoix

Savez-vous que Versoix compte entre 500 et 700 logements en zone villa dans son agglomération ?
Nous étions une soixantaine à répondre à l’invitation des autorités.
C’est donc seulement un 10% qui a montré son intérêt ou son inquiétude face à l’évolution des lois et des règlements sur la densification et à leur complexité pour cette zone.
Dans l’introduction de cette première concertation publique le 15 novembre à la salle Lachenal, M. Cédric Lambert - CA délégué à l’Aménagement et au Transport – a rappelé que les communes doivent mettre en place, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2022, une planification de la densification de la zone 5 (villas) dans leur Plan directeur communal (PDCom). Des lignes directrices (centralité, liaisons de mobilité, espaces publics structurants, ensembles patrimoniaux, éléments identitaires et des lisières. RRCVA L4 05.04 ) doivent être fixées en définissant quels seront :
les secteurs densifiés à plus de 0,6 avec modification de zone,
• les secteurs densifiés avec dérogation (0,3 à 0,6) Art. 59 al-4 en zone 5,
• les secteurs de faible densité sans dérogation (0,25 à 0,3)

C’est dans ce cadre que le bureau Tribu-Architecture (qui avait effectué un excellent travail pour l’Îlet Querret) a été mandaté pour élaborer cette stratégie de densification, d’aménagement ou de protection de la zone 5, en vue de son intégration dans le PDCom en 2022. Un groupe de suivi rassemblant quelques personnes issues d’associations d’habitants a été constitué comme « ressources locales » pour le mandataire.
Mme Isabel Garcia – cheffe du service communal de l’urbanisme – a rappelé l’historique de la densification de la zone 5 et les cas où la commune aura son mot à dire (densification accrue 0.3-0,6 et plus). Il s’agit donc de poser un diagnostic, de définir les enjeux et d’identifier les secteurs.
M. Christophe Gnaegi - directeur de Tribu-Architecture - souligne que cette concertation est voulue par les autorités et se réjouit des nombreux participants à cette concertation.
Il présente ses collaborateurs Lya Blanc et Matthieu Hofer ainsi que les membres du groupe de suivi, habitant en zone 5 à Versoix : Mme Corinne Schneckenburger (CM), MM. Marcel Croubalian (architecte), Pierre Dupanloup (ADMF), Michel Philippi (Archeville), Frédéric Python (Historien) et Yves Richard (Patrimoine). Il rappelle que ce groupe ne constitue pas une représentation de tous les quartiers, mais l’expression de diverses sensibilités et une représentation à l’échelle de la commune qui garantissent une vision d’ensemble.
La composition de ce groupe est contestée avec une insistance mal supportée.
Il est rappelé que le Canton n’a pas fixé d’objectif de densité de cette zone.
Conserver la zone villa en l’état n’est pas possible. Au gré des ventes la densification va changer, même si l’on reste en faible densification. Cela se constate déjà en de nombreux endroits de la zone 5. Et en densification faible (ou normale) la commune n'a pas son mot à dire*.
Plusieurs types de villas (6) sont présentés avec leur indice IUS. Cette intéressante comparaison donne une bonne idée des indices à considérer.
Sous forme de groupes de travail, les 4 thèmes à considérer pour cette phase de diagnostic de la zone 5 sont abordés en groupes et brièvement résumés ici par un rapporteur :
– Les affectations : – Bâti : quel genre d’habitat privilégier ? A considérer : Le cône de bruit du trafic aérien au sud,  la circulation à proximité du Collège du Léman. – Vide : espaces publics (poumons de verdure) à ne pas construire, à destination des familles, promeneurs, parc, stade.
– L’arborisation : corridors biologiques, quelles haies, comment densifier l’arborisation ? Quant aux aménagements, les lois ne peuvent et ne doivent pas tout prévoir ; les associations d’habitants se chargent d’apporter la dimension sociale, de rencontres et de services mutualisés, mieux que n’importe quelle directive ! A encourager.
– Sol et eau : le ratio de pleine terre prévu à 40% est-il suffisant ? Les parkings dans la zone villa  : complétement dans la propriété ou également sur la voie publique, la typologie de villa (voir photos et leur IUS). On s’accorde pour dire que la typologie 6 (petits immeubles) ne correspond pas à ce qui est souhaité, de même que la typologie 5 (qui date de 2015) moins choquante. Ce sont à priori les typologies 1 à 4 qui correspondent le mieux aux attentes de l’assemblée. Il est aussi rappelé que la logique historique était de densifier à l’Est du canal (côté lac) plus proche des commerces et avec une meilleure desserte en transports publics. Il serait bon de s'y tenir selon M. Malek Asghar ancien maire de Versoix et député suppléant au Grand Conseil.
– Rue : quelle position de la villa par rapport à la rue ? Il n’y a pas d’arbres sur le domaine public en zone 5 (canalisations), encourager la perméabilité piétonne.

Après ces comptes-rendus que les organisateurs ont conservés, la séance se termine avec des perspectives de réflexions - présentées malheureusement par les animateurs sous le titre « Conclusion » - qui provoque l'ire du public puisque la plupart des items indiqués ici présentaient des connotations sociétales pour le moins incomprises qui ne figuraient ni dans les discussions et ni dans les rapports présentés ce soir !

Cette première consultation publique sur la zone 5 n’était donc pas très réussie et l’on reste à ce stade avec le curieux sentiment de ne pas savoir à quelle sauce va-t-on être mangés par ces perspectives de densifications qui nous seront finalement … imposées plutôt que proposées.
Selon les attributions de densification, les parcelles se verront plus ou moins valorisées. Cela ressemble curieusement au casino !
*(ndlr : il faut donc densifier beaucoup pour pouvoir infléchir ou orienter le genre de constructions. Il y a des lois curieusement faites. "Pile je gagne, face tu perds " disait le législateur à ses administrés ! Merci la LCI !) 

La deuxième concertation publique auprès des habitants aura lieu en janvier et la synthèse finale du travail et de son intégration au Plan directeur communal est prévue à fin mars 2022.

Il n’est pas facile de comprendre les enjeux, mais cela vaut la peine de s’y intéresser ! Nous regrettons que peu de chose soit en ligne sur le site de la Mairie !
C'est pourquoi nous joignons à cet article, d'autres documents explicatifs pour améliorer la compréhension de ces questions de densifications. Pour cela, il suffit de lire ce QRCode.

Contexte local et cadre légal

On le sait par les nuisances subies particulièrement sur la rive droite qui cumule celles de l’autoroute, des voies CFF et celles du trafic aérien. Cette rive droite, qui représente environ le tiers du territoire genevois, n’est représentée au Grand conseil que par une demi-douzaine de parmi les 100 députés. On l’a vu aussi à propos du PSIA et de l’expansion de l’Aéroport : les exécutifs communaux de cette région riveraine de l’aéroport ont de la peine à se faire entendre. Malgré le succès de l’initiative 163 à fin 2019, malgré l’urgence des questions climatiques, malgré certaines leçons "positives" apportées par le covid Tranquilité, chants des oiseaux, ciel sans trainées), la croissance à tout prix est toujours de mise à Genève. Sur ce territoire pourtant très limité, il faut toujours « répondre à la demande » et même la provoquer, en attirant toujours plus d’entreprises et d’habitants, sans trop se soucier du bien-être et de la nature.
Contexte genevois : on compte à Genève 190 emplois pour 100 résidents (avec un taux de chômage de 5%, de 60% plus élevé que la moyenne suisse).
Et l’on s’évertue à attirer les multinationales et les pendulaires qui, à terme, cherchent naturellement à se loger à proximité, favorisant l’explosion du prix des terrains et des loyers et la nécessité de densifier toujours davantage sur un territoire qui restera fini et limité (à moins que le Grand Genève ne devienne un jour genevois, du Bouveret à Gex en passant par St-Julien) !
C’est dans cette spirale infernale que nos élus cantonaux et fédéraux nous conduisent sous prétexte de pouvoir loger nos enfants ! Cela conduit à construire des clapiers pour humains entre citernes et aéroport (voir le quartier de l’Etang par exemple) dont le 3 pièces vendu en PPE est plus cher qu’une petite villa il y a 20 ans ! Cherchez l’erreur ! Selon cette logique, le progrès c’est vivre moins bien et payer plus (pour la plupart des gens de la classe moyenne). Nos enfants s’en souviendront.

auteur : Pierre Dupanloup

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