14.03.2023 par SL
num.327 avril 2023 p.06
Pourquoi se vacciner contre l’hépatite B

L’hépatite B (VHB) est considérée comme une maladie infectieuse extrêmement contagieuse, dix fois plus que le VIH. C’est pour cette raison qu’en mai 2016, l’Assemblée mondiale de la Santé a reconnu l’hépatite virale comme une menace pour la santé publique et a proposé de l’éliminer d’ici à 2030. Pour atteindre cet objectif, elle a fournit aux Etats Membres des lignes directrices pour élaborer des programmes nationaux complets de lutte contre l’hépatite et des stratégies d’élimination. Pourtant, nous sommes bien loin d’atteindre les objectifs fixés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), surtout dans les pays à revenu revenu faible et intermédiaire.

La transmission

L’hépatite B (VHB) est une infection virale qui se transmet par le sang, s’attaque au foie et peut entraîner aussi bien une affection aiguë que chronique. Si elle n’est pas traitée, elle peut provoquer des infections chroniques et entraîne un risque important de décès par cirrhose ou cancer du foie pour les personnes exposées.

L’VHB est transmise lors de pratiques d’injection à risque, notamment dans la réutilisation ou la stérilisation insuffisante de matériel médical dans les établissements de soins de santé, dans les communautés ou chez les consommateurs de drogues injectables. Elle est également transmise par les tatouages, les piercings et l’exposition au sang ou à des liquides biologiques infectés.

Dans les zones de forte endémie, l’VHB se propage le plus souvent de la mère à l’enfant lors de l’accouchement (transmission périnatale) ou selon un mode de transmission horizontal (exposition à du sang infecté), notamment entre un enfant infecté et un enfant non contaminé, pendant les cinq premières années de vie.

Une personne meurt toutes les 30 secondes d’une hépatite virale

Epidémiologie

Selon estimations de l’OMS pour la seule année 2019, l’VHB a causé 1,5 millions de nouvelles infections et 820.000 de décès dans le monde. Elle estime par ailleurs qu'environ 2.7 million de personnes sont co-infectées avec le HIV et l’VHB.

296 millions de personnes (3.5% de la population mondiale) vivent aujourd'hui avec une infection chronique par le VHB dans le monde, en grande majorité dans les pays à revenu faible et intermédiaire où les populations ont peu, voire aucun accès au dépistage, diagnostic et au traitement. La charge d’infection par le VHB est la plus élevée dans la région de l’OMS Asie Sud-Est/Pacifique occidental et en Afrique, où respectivement 134 millions et 82 millions de personnes sont infectées de façon chronique. 60 millions de personnes sont infectées dans la Région de la Méditerranée orientale (Figure 1).

En Suisse, on estime à 40'000 le nombre de personnes infectées, soit environ 0,5 % de la population, les hommes étant de loin les plus touchés (57% des cas en 2020). En 2020, 938 nouveaux cas d’VHB ont été annoncés à l’OFSP, ce qui correspond à un recul de 16 % par rapport à l’année 2000 (1.200 cas). On observe toutefois d’importantes disparités entre les régions. Les chiffres les plus hauts se situaient dans la région lémanique et le Tessin (Figure 2). La tendance à la baisse est toutefois visible dans toutes les grandes régions. Les cas d’infections par le VHB déclarés en Suisse ont été majoritairement contractés à l’étranger dans des pays à forte prévalence de l’hépatite B chronique.

Traitement

L'infection par le VHB est “silencieuse” car elle se déroule la plupart du temps sans symptômes. Le diagnostic peut donc être posé même plusieurs années, voire décennies, après l’infection, laissant la maladie avancer entre-temps.

En 2019, dans le monde seulement 30,4 millions d’individus (10,5% de la population totale estimée de personnes vivant avec l’VHB) avaient connaissance de leur infection, dont seulement 6,6 millions des personnes diagnostiquées (22%) étaient sous traitement.

À ce jour, il n'y a pas de cure contre une infection chronique, mais elle peut se traiter par des médicaments antiviraux, d’ailleurs les mêmes qu’on utilise comme traitement de première intention des infections à VIH. Ce traitement peut ralentir la progression de la cirrhose, réduire l’incidence des cancers du foie et améliorer la survie à long terme. Le traitement a aussi l’avantage d’empêcher la transmission de l’infection.

Néanmoins, des barrières d’accès au diagnostic et au traitement, notamment le prix, ainsi que des infrastructures médicales insuffisantes surtout dans les pays à revenu faible et intermédiaire concernés ne garantissent pas un accès équitable à la prévention et aux soins, conformément à l’engagement de l’OMS en faveur de la couverture sanitaire universelle.

Le prix du traitement et la prise en charge de celui par le système sanitaire national ou par des assurances privées varient en fonction des pays, notamment des ressources budgétaires ou aux aides au développement disponibles pour mettre en place de programmes nationaux d’élimination pour atteindre les objectives du 2030. En Suisse les médicaments sont remboursés par l'assurance maladie obligatoire de base.

Prévention

L’âge de l’infection est inversement proportionnel au risque d’infection chronique. Chez l’adulte, une infection par le VHB débouche sur une hépatite chronique dans moins de 5 % des cas, tandis que, chez les nourrissons et les jeunes enfants, elle provoque l’apparition d’une forme chronique de la maladie dans environ 90 % des cas.

Depuis le début des années 1980, un vaccin contre le HVB, sûr et efficace, est disponible. Le vaccin est expressément recommandé aux enfants et aux adolescents de 11 à 15 ans non vaccinés, si possible avant le début de la vie sexuelle, ainsi qu’aux groupes particulièrement vulnérables. La protection acquise dure au moins 20 ans et probablement toute la vie.

Depuis 2004, l’OMS recommande d’administrer le vaccin à tous les nourrissons dès que possible après la naissance, de préférence dans les 24 heures, afin d’augmenter l’immunité surtout dans les pays à forte prévalence de l’hépatite B. Cependant, il y a souvent d’énormes difficultés à atteindre les enfants dans les 24 heures suivant la naissance dans les régions où les naissances ont tendance à se produire à la maison ou dans les communautés rurales, loin de structures hospitalières ou décentralisées.

En 2019, la couverture mondiale de trois doses est estimée à 85 % en 2019 (contre seulement 30 % en 2000) et la celle de la première dose 24 heures après la naissance est estimée à 43% (mais seulement 17% en Afrique). Des estimations issues de modèles mathématiques ont montré que si la couverture infantile atteignait 90 %, comme préconisé par la stratégie de l’OMS, et que la première dose était administrée à la naissance, 84 % des décès liés à l'hépatite B dans le monde pourraient être évités.

Pourtant, en 2021, la Suisse n’avait pas encore atteint cet objectif, ni directement chez les jeunes enfants (couverture de 73 % à l’âge d’un an - comme la Libye et pire que le Soudan, le Niger et l’Iraq par exemple) (Figure 3) ni indirectement (74 % à l’âge de 16 ans). Le pourcentage de la couverture vaccinale chez les adultes sexuellement actifs est même bien inférieur. Pour rappel en Suisse la vaccination contre l’hépatite B ne fait partie des vaccinations de base dans la petite enfance que depuis 2019.

En plus de la vaccination infantile, l’OMS recommande la prophylaxie antivirale pour prévenir la transmission de l’VHB de la mère à l’enfant ainsi que l’administration des immunoglobulines spécifiques contre l’VHB après la naissance, afin de protéger les bébés jusqu’à ce que le vaccin agisse.

Eliminer l’HVB c’est possible

Il est possible d’envisager un avenir sans VHB grâce aux technologies disponibles, notamment un vaccin sûr et efficace et aux médicaments antiviraux, et à un effort concerté. Il est surtout essentiel renforcer la vaccination des nourrissons et des enfants et en faire une priorité dans tous les pays.

D’après les dernières estimations de l’OMS, la part des enfants de moins de 5 ans présentant une infection chronique par le VHB est passée à un peu moins de 1 % en 2019, contre 5% environ à l’ère pré-vaccinale. C’est un résultat très encourageant et pour l’instant la seule cible mondiale atteinte en matière d’élimination de l’hépatite virale dans le cadre des ODD à l’horizon 2030.

Pour atteindre les autres cibles mondiales en matière d’élimination de l’hépatite dans le cadre du Programme de développement durable à l’horizon 2030, il faudrait une forte volonté politique des pays concernés et un grand soutien des bailleurs de fonds internationaux publics et privés pour mettre en place de programmes nationaux de prévention, dépistage, traitements et soins, à grande échelle et financièrement soutenables, surtout dans les pays à revenu faible et intermédiaire.

Par ailleurs, il a été estimé que l’élimination va aussi apporter des bénéfices sanitaires et socio-économiques indirects, notamment une diminution des coûts de santé liés aux maladies non communicables, une amélioration de la qualité de vie et de la productivité.

Quoi faire concrètement en Suisse

Pendant la grossesse, il est important de faire régulièrement des contrôles chez le gynécologue qui, en cas d’infection, prendra des mesures pour protéger le bébé et traiter la mère. Après la naissance vaccinez votre bébé sans tarder.

Les enfants adolescents (11-15 ans) nés avant 2019 et qui n’ont pas été vaccinés à la naissance peuvent se faire vacciner contre l’HVB, lorsqu’ils se font vacciner contre le papilloma virus (HPV) dans le cadre du Programme national VIH et autres infections sexuellement transmissibles (PNVI). Les deux vaccins sont pris en charge par l’assurance maladie de base.

Il n'est jamais trop tard pour rattraper une ou plusieurs vaccinations chez les adultes. N'hésitez pas à faire vérifier votre carnet de vaccination par votre médecin qui saura vous conseiller, notamment si commencer ou compléter les vaccinations.

Chez les adultes, il est également utile faire un dépistage de l’hépatite B ou C car en cas de positivité confirmée, vous pouvez tout de suite avoir accès aux traitements antiviraux pour bloquer l’infection et ainsi arrêter la transmission de la maladie aux autres.

Allez vous faire vacciner, c’est un cadeau pour la vie !

Plus d’info www.who.int/fr et https://www.bag.admin.ch/bag/fr/home.html

auteur : Sabrina Lanzavecchia

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