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15.04.2025 par MG
num.348 mai 2025 p.08
Sommes-nous la génération bof ?

Le jeudi 10 avril, sur la droite de la Tribune de Genève, le titre de l'éditorial était tout simplement "Le climat ? Bof".

Elle a été inspirée par le fait que tout le monde semble avoir (délibérément ?) oublié la condamnation de la Suisse par la CEDH pour son inaction en matière de climat. La réaction de certains politiciens a été de rejeter le résultat, au motif que nous avons un gouvernement démocratique qui peut prendre ses propres décisions.

Nombreux sont ceux qui s'accordent à dire que ce que l'on appelle le "changement climatique" est une véritable menace à long terme, mais lorsque l'on interroge les gens à ce sujet, la réponse est trop souvent que nous ne pouvons rien y faire individuellement. Parler du fait que chaque mois est souvent le plus chaud, le plus sec ou le plus humide depuis le début des relevés de températures se heurte à une réponse du type "Bof, ...". Un rapport de l'ETH Zurich daté du 21 mars, à l'occasion de la première Journée mondiale des glaciers, indique que "rien qu'en 2022 et 2023, 10 % de la glace glaciaire de la Suisse a disparu en raison des températures estivales record". Je me souviens qu'il y a de nombreuses années, lors de vacances à Riederalp au mois de mars, nous sommes montés à pied pour voir le glacier d'Aletsch dans toute sa majesté. Vous voulez le voir aujourd'hui ? Interroger les jeunes à ce sujet, c'est risquer de se faire répondre "Bof".

Il est également évident que l'aviation joue un rôle non négligeable dans le changement climatique, en particulier dans les régions montagneuses de la Suisse. Lorsque nous avons annoncé que l'assemblée générale annuelle de l'ARAG comprendrait une présentation d'un éminent professeur de l'EPFL sur la manière dont l'aéroport de Genève pourrait contribuer à assurer la neutralité carbone en 2050, j'ai demandé à quelques amis s'ils accepteraient d'y assister ! La réponse générale a été "Bof", suivie d'un déni de toute responsabilité. Même l'aéroport ne semblait pas intéressé !

L'une des "solutions" fréquemment proposées est que les avions et les compagnies aériennes passent à l'utilisation systématique de Synthetic Aviatio Fuel (SAF). Cependant, un article publié par Reuters le 27 mars dernier titrait "Les compagnies aériennes européennes ne parviendront pas à atteindre leurs objectifs en matière de carburants verts, avertissent les PDG".

Pour rappel, l'UE exige une utilisation de 6 % de carburant vert d'ici 2030. Ces PDG de Ryanair, Lufthansa et Air France-KLM, soutenus par l'IATA, l'organisation professionnelle de l'aviation, "se sont détournés du discours pro-vert qu'ils ont défendu ces dernières années". Les raisons invoquées sont que le carburant vert coûte trop cher et que sa production est trop faible. En tant que tel, un mandat SAF ajoute aux coûts réglementaires déjà élevés, de sorte que les compagnies aériennes européennes risquent de perdre leur compétitivité.

Compte tenu de la devise officielle américaine "drill, baby, drill" et de l'absence de tout mouvement significatif en faveur de l'environnement, le message est que pratiquement TOUTES les compagnies aériennes ne tiendront compte que des coûts ! Des rapports indiquent déjà que les compagnies aériennes voient diminuer le nombre de passagers à destination ou en provenance des États-Unis. Même les statistiques de l'aéroport de Genève pour les trois premiers mois de 2025 montrent qu'en dépit d'une fabuleuse saison de ski, le trafic de passagers est toujours inférieur à celui de 2019.

Sachant que, selon Le Matin Dimanche du 13 avril, Genève pourrait bientôt devenir le canton suisse le plus riche, on voit mal l'influence du PLR sur l'aéroport et le Conseil d'Etat genevois plaider sérieusement en faveur d'une utilisation à grande échelle du SAF.

À la génération "Bof", je rappelle les paroles du président américain John F. Kennedy dans son discours d'investiture : "Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous, mais ce que vous pouvez faire pour votre pays."
Bof !
 

 

 

 

auteur : Mike Gérard

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